Par Jean-Louis SANTINI 22-09-2007 WASHINGTON (AFP) -

L'arrêt de l'essai clinique international d'un vaccin expérimental contre le sida du laboratoire américain Merck, qui était considéré comme l'un des plus prometteurs, porte un sérieux coup aux efforts de la médecine pour mettre fin à cette pandémie dévastatrice.

L'Institut national américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID) qui cofinançait ce vaste essai clinique avec Merck, a indiqué vendredi soir la décision d'un comité indépendant d'y mettre fin. Cette décision s'appuyait sur des analyses de données intermédiaires montrant que le vaccin n'empêchait pas l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), responsable du sida, ou ne diminuait pas la charge virale.
Merck avait commencé en 2004 à recruter 3.000 volontaires non-infectés de 18 à 45 ans aux Etats-Unis et dans plusieurs pays d'Amérique latine pour cet essai clinique baptisé STEP afin de tester ce nouveau vaccin, le premier d'une nouvelle classe.
Contrairement aux vaccins traditionnels déjà testés sans succès contre le virus du sida, qui consistaient à doper l'immunité de l'organisme, celui de Merck visait à stimuler les lymphocytes T, une composante du système immunitaire.
Des expériences préliminaires sur des animaux et des tests limités sur des humains avaient donné des résultats encourageants, conduisant Merck et les chercheurs du NIAID à développer ce vaccin consistant en des virus du rhume atténués auxquels trois protéines du VIH avait été ajoutées.

"Ce vaccin était vu comme la stratégie la plus prometteuse et je pense que cet échec est une déception pour nous et pour tous ceux travaillant sur des vaccins", a déclaré le Dr Mark Feinberg, directeur général de Merck, cité par le New York Times.
Tout en jugeant "les résultats de ce test décevants", Dr Anthony Fauci, le directeur du NIAID, a estimé qu'il était cependant trop tôt pour jeter au feu cette nouvelle classe de vaccins antisida.
Mais cet échec conforte l'idée selon laquelle le virus du sida est différent de tous les autres pathogènes contre lesquels la médecine a pu développer des vaccins.
La quête acharnée pour trouver un vaccin a donné lieu à une soixantaine d'essais cliniques au cours des dernières années dans le monde pour tester quelque 30 candidats dont un grand nombre sont encore en cours.
En mai 1997, le président Bill Clinton avait fait de la mise au point d'un vaccin dans les dix ans une priorité nationale américaine.

"Créer un vaccin pour empêcher la transmission du VIH ou tout au moins en limiter le potentiel pathogène (...) représente l'un des plus grands défis de notre époque", avait lancé Bette Korber, une chercheuse des Laboratoires Nationaux de Los Alamos (Nouveau-Mexique, sud-ouest) devant la conférence annuelle sur les rétrovirus (CROI) de 2006. "Le virus est extraordinairement divers dans le monde, évolue rapidement même chez un seul individu infecté et effectue des mutations pour échapper aux défenses immunitaires de l'organisme lors d'une même infection", ajoutait ce médecin.

Depuis l'identification du virus VIH en 1981, le nombre de porteurs du pathogène ne cesse d'augmenter avec près de 40 millions de personnes infectées dans le monde, dont plus de quatre millions de nouvelles infections chaque année, à 90% dans les pays en développement.

En 25 ans, le sida a fait plus de 25 millions de morts dont la majorité en Afrique sub-saharienne.