Source: CNRS

C'est une véritable prouesse... et une première mondiale. Des chercheurs ont réussi à observer à l'échelle atomique une des futures stars de l'électronique, qui attise la convoitise des industriels: la microbatterie dite "tout solide" (à la différence des batteries classiques, tous les éléments sont solides dans une telle batterie. Ce qui permet de les miniaturiser facilement et d'éviter les courts-circuits), pas plus épaisse qu'un cheveu, et qui pourrait se glisser demain dans n'importe quel recoin de circuit intégré. C'est que jusqu'à maintenant, personne n'était encore parvenu à observer ces batteries à l'échelle atomique, un impératif si on veut mieux comprendre leur vieillissement et améliorer leurs performances. Mais voilà: elles sont trop grosses pour passer sous un microscope électronique à transmission (MET), seul capable de révéler l'intimité de la matière. L'équipe du Laboratoire de réactivité et de chimie des solides (LRCS - Laboratoire CNRS / Université Amiens), à Amiens, en collaboration avec des chercheurs japonais de l'université de Tohoku, a donc eu l'idée de découper une minuscule portion de batterie avant de la placer sous le MET (Chemistry of Materials, 25 mars 2008).

Véritable exercice de précision: les chimistes français ont taillé, au moyen d'un faisceau d'ions focalisé, une lamelle d'à peine 100 nanomètres d'épaisseur, dans toute la profondeur de la batterie construite par leurs collègues japonais. "Ainsi, nous avions entre les mains une version miniature de la batterie d'origine, explique Loïc Dupont, membre de l'équipe amiénoise. Et nous pouvions enfin explorer sa structure au microscope." Sous les yeux vigilants des scientifiques, des défauts criants sont alors apparus. "Nous avons constaté que des constituants des électrodes de la batterie avaient migré vers l'électrolyte et vice versa", précise le même chercheur. Isolant entre les deux électrodes positives et négatives, l'électrolyte devait justement empêcher le passage d'éléments de l'une à l'autre sous peine de court-circuit.

Armés de telles observations, les chercheurs réfléchissent maintenant à des parades pour améliorer leurs batteries. Ils savent ainsi qu'ils devront changer quoi qu'il arrive la composition de l'électrolyte. Et, pour aller plus loin encore, ils tenteront d'ici peu d'observer toujours sous le MET une microbatterie, mais cette fois en plein fonctionnement. De quoi mieux comprendre la formation des défauts et identifier les composants les mieux adaptés. Une priorité dans un contexte où tous nos gadgets électroniques – ordinateurs, téléphones portables, appareils photo – se miniaturisent et où les batteries doivent donc se faire de plus en plus petites. Selon certains, les microbatteries pourraient même alimenter un jour des capteurs miniatures qu'on injecterait directement dans le corps des patients pour une analyse médicale.