Source: BE Allemagne numéro 393 (9/07/2008) - Ambassade de France en Allemagne / ADIT -

Une équipe de chercheurs de l'Institut Max Planck de génétique moléculaire (Berlin), en collaboration avec l'entreprise Genomatix Software (Munich), est parvenue à expliquer en partie pourquoi l'organisme humain présente une grande diversité de cellules et de fonctions, alors qu'il ne possède qu'une information génétique limitée (25.000 gènes, soit à peine plus qu'un ver nématode).

Grâce à une nouvelle technologie de séquençage, l'équipe du Dr. Marie-Laure Yaspo a pu démontrer que de nombreuses molécules d'ARN messagers (ARNm) (*) détectées ne correspondaient à aucun gène connu. Ceci implique, selon eux, que certaines molécules d'ARNm seraient issues d'un autre mode de transcription de l'information génétique, une alternative au classique processus d'épissage (dans le noyau de la cellule, toutes les parties codantes d'un gène -ou exon- sont transcrites selon le processus d'épissage en ARNm -acide ribonucléique messager-; l'ARNm quitte ensuite le noyau pour accéder au plasma où les ribosomes synthétiseront les protéines en décodant l'information génétique contenue dans l'ARNm).

La méthode de séquençage utilisée est la technologie des puces à ADN, ou Bio-Chips, un ensemble de molécules d'ADN fixées sur une surface de verre, de silicium ou de plastique. Les ARNm extraits des cellules sont identifiés à l'aide d'un marqueur fluorescent. Le principe de détection consiste à introduire les molécules d'ARNm dans la puce à ADN qui se fixent aux séquences d'ADN présentes dans la puce si celles-ci leur sont complémentaires. L'intensité du signal fluorescent que les molécules d'ARNm émettent permet de quantifier le nombre de molécules d'ARNm actives dans la cellule. Cette méthode de détection s'avère très sensible puisqu'elle permet d'identifier jusqu'à une seule molécule d'ARNm dans les cellules étudiées. Ce niveau de détection constitue une avancée technologique considérable. L'écart en terme de sensibilité avec les résultats précédemment obtenus est du même ordre que la différence de stockage entre un CD et un DVD.

L'équipe de recherche a révélé le nombre considérable de molécules d'ARNm présentes dans les cellules étudiées. Sur les 25.000 gènes recensés dans le génome humain, 15.000 gènes étaient en effet actifs dans les cellules rénales, 14.000 dans les lymphocytes B, des chiffres beaucoup plus élevés que ceux auxquels s'attendaient les chercheurs. Selon le Dr. Yasto, toutes les parties codantes d'un gène ne seraient pas forcément transcrites en ARNm, l'organisme pourrait ainsi synthétiser plusieurs molécules d'ARNm à partir de différentes combinaisons d'exons dans un même gène. C'est le phénomène dit d'épissage alternatif: chaque gène peut produire une série d'ARNm, tous différents les uns des autres. Les chercheurs ont ainsi identifié, en plus des molécules d'ARNm issues d'un épissage classique, un nombre de molécules d'ARNm (34% des molécules d'ARNm totales) qui n'ont pu être attribuées à aucun gène connu.

Cette découverte permet aux chercheurs d'appréhender de nouvelles possibilités de transcription de l'information génétique chez l'Homme. Le Dr. Yasto conclut que cette découverte influencera certainement de futures recherches sur les causes moléculaires de certaines maladies humaines comme le cancer où l'information contenue dans les cellules est notamment souvent transcrite autrement que dans un organisme sain.