Par Rémi Sussan, le 07/01/09

Dans la perspective d’une convergence de ce qu’on appelle les NBIC (neurosciences, biotechnologies, informatique et cognition, voir l’explication qu’en donne Jean-Michel Cornu), la cognition est celle dont la présence reste la plus mystérieuse. Il est facile de saisir l’aspect technologique, mais la cognition n’est-elle pas quelque chose de plus abstrait, de plus fondamental ? (...)

Regarder le fonctionnement du cerveau sous son aspect technologique est certainement le changement de paradigme le plus troublant de ces dernières années : avec la cognition, (l’étude des processus mentaux), l’esprit humain a perdu ses derniers restes de sacralité. Comme la matière, comme la vie, il se manipule, se triture, devient prétexte à des expérimentations de toutes sortes.

Ce rapport technologique au cerveau, on peut le décliner d’au moins trois façons.

La plus évidente: le cerveau, de plus en plus, devient objet de technologie. On multiplie les interfaces, les produits chimiques destinés à modifier son fonctionnement. On l’augmente, on l’améliore, on le rend toujours plus perfectible. C’est le rêve du cyborg, qui en devient kitch à force d’être futuriste.

La seconde manière est plus subtile, plus philosophique : elle souligne que l’esprit n’est jamais absent de la technologie. Comprendre le fonctionnement de notre cerveau peut nous aider à trouver des technologies qui permettront de dépasser ses limites. Comprendre la nature de l’information, le fonctionnement de l’esprit est donc nécessaire pour maitriser la nouvelle révolution technologique. (Cf William Wallace , dans le rapport NBIC de la NSF (.pdf) : "Ce que les cogniticiens peuvent penser
Les gens de la nano peuvent le construire Ceux de la bio peuvent le développer, et ceux des technologies de l’information peuvent le maitriser.”) Autrement dit, ce qui peut être pensé peut être réalisé. Mais qu’en est-il de ce qui ne peut pas être pensé ? Ce qui apparait tout d’abord comme un truisme (bien évidemment, si on ne peut penser à quelque chose, on ne peut le réaliser) peut se transformer en un projet “d’homme augmenté”. On peut peut être y arriver en “boostant” les capacités du cerveau, mais aussi en en construisant de tout nouveaux, débarrassés des limites cognitives de notre organe biologique, qui sont nombreuses. Une attitude prônée par certains futuristes “singularitariens” qui considèrent l’architecture de notre cerveau comme trop obsolète pour être sauvée.

Une troisième vision, peut-être la plus importante, se situe plutôt au niveau des mentalités. Le cerveau peut être vu comme un objet technologique en lui même : un nouveau modèle d’ordinateur dont chaque possesseur doit, chacun à sa manière, acquérir la maitrise.

C’est peut-être le point le plus important des technologies NBIC : si pour beaucoup elles représentent de nouveaux et terrifiants moyens de contrôle par les États, les institutions, les corporations, elles possèdent toutes la promesse de devenir, entre les mains de l’individu lambda, des outils susceptibles de l’aider à prendre en main sa destinée.

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