Par Rémi Sussan le 20/01/09

C’est la crise. Le patient château de cartes élaboré au fil des dernières années par les institutions financières s’est effondré d’un seul coup. Une occasion - de plus - pour constater les limites de la croyance en l’homo economicus, animal rationnel qui sait en toutes circonstances choisir ses options en fonction de son intérêt bien compris.

La couverture de Philosophy in Flesh, le livre de George LakoffNous avons vu que le cerveau humain ne correspondait guère à un ordinateur de type PC, en ce qui concernait les entrées-sorties ou la mémoire… Un coup d’oeil sur la manière dont il prend les décisions nous fera comprendre que le cerveau n’est pas, et de loin, une CPU classique (Central Processing Unit pour “Unité centrale de traitement” c’est-à-dire le processeur d’un ordinateur qui interprète les instructions et traite les données d’un programme).

Notre raisonnement abstrait n’est pas seulement influencé par le corps, les émotions, et les sens ; bien plus que cela, il est bâti dessus. Pour le linguiste cognitif George Lakoff, même l’architecture la plus abstraite conçue par l’homme, les mathématiques, repose finalement sur un ensemble de métaphores qui trouvent leur origine dans le corps. Dans son livre, Philosophy in the flesh (Philosophie dans la chair), il résume ainsi sa conception de l’esprit :
L’esprit est fondamentalement incarné. La pensée est la plupart du temps inconsciente. Les concepts abstraits sont largement métaphoriques. Voici les trois découvertes majeures des sciences cognitives. (…) A cause de ces découvertes, la philosophie ne pourra plus jamais être la même.

L’intuition et la raison
Selon Jean-Michel Cornu, le neurologue Alain Berthoz divise en deux circuits nos capacités de décision : il y a les “voies courtes”, capables de réagir en 80 ms, et donc idéales pour faire face aux dangers, et les voies longues, qui correspondent à la “pensée” au sens où on l’entend habituellement.

D’autres préfèreront opposer les différentes parties du cerveau. C’est le genre de choses qu’on voit dans les analyses utilisant l’imagerie par résonance magnétique (IRM) tant prisées par les adeptes du neuromarketing. On évoque alors l’activité de l’amygdale (qui réagit face au danger) du cortex préfrontal, qui correspond à nos capacités de planification et de décision, etc. Mais il n’est pas toujours facile d’associer une fonction mentale avec une zone du cerveau.

Un économiste comme Terry Burnham simplifie les choses en se contentant d’opposer l’ancien cerveau (Burnham parle du “cerveau du lézard” dans son livre Mean Markets and Lizard Brains), celui qui s’est progressivement développé au cours des millions d’années d’évolution et le cerveau moderne, celui qui héberge nos facultés de raisonnement abstraites. Mais en fait, point n’est besoin d’entrer dans des considérations anatomiques. On peut voir les choses de manière complètement abstraite. C’est largement suffisant pour notre hypothétique cognhacker, qui se pose les questions pratiques (Que faire ? Comment ça marche ?).

Lire la suite