Source: BE Etats-Unis numéro 150 (23/01/2009) - Ambassade de France aux Etats-Unis / ADIT -

De récents travaux menés à l'université "Penn State" présentent une belle illustration de la théorie (Le mot théorie vient du mot grec theorein, qui signifie « contempler, observer, examiner ». Dans le langage...) de l'évolution en action. En effet, d'après les recherches de Tracy Langkilde (professeur de biologie à l'"Eberly College of Science"), un lézard (appelé "fence lizard") aurait radicalement modifié son comportement afin de survivre aux attaques d'une espèce invasive de fourmi ("fire ant" en anglais). Ces recherches ont par ailleurs mis en évidence une mutation des pattes arrière des lézards soumis au stress récurrent des fourmis. Ce changement d'anatomie permettrait ainsi au reptile d'amplifier ces comportements de défense pour faire face à ses prédateurs afin de survivre dans son habitat naturel.

Les "fire ants", espèce invasive originaire de l'Amérique du sud, ont été introduites accidentellement aux Etats-Unis dans les années trente. Ces fourmis immobilisent leur proie par une injection de venin paralysant les muscles de l'animal. Seules 12 de ces insectes suffisent pour tuer en moins d'une minute un lézard d'une dizaine de centimètres.

Les travaux de Langkilde sont le résultat d'une série d'expériences menées en parallèle sur quatre sites. Le premier site, appelé site témoin, avait pour but d'observer le comportement du lézard sans la présence de fourmi. Les trois autres sites ont permis observer le comportement du reptile soumis à des attaques de fourmis depuis 23 ans pour le premier site, 54 ans pour le second et 68 ans pour le troisième. Ces expériences ont ainsi mis en évidence une corrélation entre le facteur temps et le changement de comportement des lézards. Alors que les lézards familiers aux attaques ont montré des comportements de défense permettant de repousser les fourmis (notamment en donnant des coups avec les pattes arrière), ceux du site témoin n'ont montré aucun signe de rejet, fermant les yeux et restant immobiles.

Afin de déterminer si les mutations observées au niveau des jambes pouvaient influencer la capacité du lézard à se défendre, Langkilde a mesuré les pattes de chaque lézard. Après comparaison, les lézards ayant acquis des comportements de défense avaient en effet des pattes plus longues que ceux n'ayant pas été soumis au stress des prédateurs. Il semblerait par ailleurs que cette spécificité anatomique se transmette à la progéniture, mettant en évidence l'implication d'une mutation génétique.

Langkilde souligne ainsi que la sélection naturelle devrait nettement favoriser les lézards ayant développé des comportements de défense, les autres ayant plus de difficulté à survivre jusqu'à l'âge de la reproduction. De plus amples études sont néanmoins nécessaires pour statuer sur ce changement de comportement. Langkilde souhaite par exemple déterminer si la progéniture de lézards possédant de longues pattes peut perdre son comportement de défense lorsque celle-ci n'est pas exposée à l'attaque de fourmis dès le plus jeune âge. Les résultats actuels de ces recherches seront publiés à la fin du mois dans le journal Ecology.