Auteur de l'article: Pierre-Alain RUBBO

Le 12 février 2009 l’équipe berlinoise du Dr Eckhard Thiel publiait dans la plus prestigieuse revue médicale New England Journal of Medicine le cas d’un patient séropositif pour le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) qui a dû subir une transplantation de moelle osseuse visant à soigner une leucémie et chez lequel le virus a ensuite disparu. En effet, aucun signe de la maladie n’a pu être déterminé dans son organisme plus de 20 mois après la transplantation alors que le patient, un américain de 42 ans, n’est plus traité contre le VIH.

Le virus a besoin d’une cellule pour se multiplier et ainsi infecter d’autres cellules. Le VIH pénètre dans ses cellules hôtes, les lymphocytes T CD4+, après fixation à la protéine CD4 ainsi qu’à l’aide principalement d’une autre protéine CCR5 aussi retrouvée à la surface de ces cibles. Or, d’autres études ont montré que les cellules qui ne possèdent pas de CCR5 ou qui ont un CCR5 muté sont résistantes au VIH.

Le patient souffrant de leucémie a reçu comme traitement une transplantation de cellules souches dans le but de régénérer son système immunitaire affaibli. Ces cellules souches sont des cellules qui deviendront de nouveaux globules blancs (dont des lymphocytes T CD4+) une fois injectées au patient.

Les auteurs ont réalisé la transplantation à partir d’un donneur compatible dont les cellules ont la particularité d’avoir une délétion d’une partie du gène responsable de la fabrication de CCR5. Ces cellules possédant une protéine CCR5 non fonctionnelle pour le virus, l’empêchent de les infecter et donc de se multiplier pour se propager dans l’organisme, leur conférant une immunité face au VIH. Cette mutation est retrouvée chez environ 1% de la population blanche qui est donc résistante au VIH de manière naturelle.

A la suite de la transplantation de ces cellules avec la protéine CCR5 mutée, le patient a vu son nombre de lymphocytes T CD4+ remonter progressivement indiquant que ceux-ci ne sont plus infectés. Depuis la greffe, le VIH est indétectable dans son organisme. Ce cas encourage de nouvelles approches ciblant le CCR5 dans la lutte contre le VIH et relance le débat sur la thérapie génique qui consiste à introduire dans l’organisme malade des cellules modifiées génétiquement pour restaurer certaines fonctions déficientes chez le receveur. De telles manipulations avaient engendré plusieurs cancers dont certains mortels après des tests thérapeutiques chez des bébés bulles en 2002 malgré un important succès clinique.