Mécanisme de résistance des bactéries
Par Benje le samedi, mai 30 2009, 20:06 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS
Dans un article à paraître dans Science, des équipes de l'Institut Pasteur et de l'université de Limoges, associées au CNRS et à l'Inserm, décryptent pour la première fois le mécanisme
moléculaire par lequel les bactéries peuvent acquérir des
multirésistances aux antibiotiques, et par lequel elles peuvent même
adapter ces résistances à leur environnement.
Cette découverte souligne les difficultés que devront prendre en compte
les stratégies de santé publique face aux problèmes posés par les
multirésistances.
La multirésistance des bactéries aux antibiotiques est un phénomène
apparu à la suite de l'utilisation de ces médicaments, dans les années
1950. On a découvert par la suite que les gènes de résistance étaient
facilement capturés, disséminés et échangés d'une bactérie à l'autre
par un système de "couper/coller" génétique de structures contenant ces
gènes, appelées intégrons. Mais la dynamique de ces échanges, qui conditionne le développement des multirésistances chez les bactéries, restait inexpliquée.
Les travaux de chercheurs de l'Institut Pasteur associés au CNRS (unité
Plasticité du génome bactérien, CNRS URA 2171) et de l'Inserm, au sein
de la Faculté de médecine de Limoges (EA3175, Inserm, Equipe Avenir),
en collaboration avec des équipes espagnoles, révèlent aujourd'hui pour
la première fois comment les bactéries acquièrent ces propriétés de
multirésistances. Ce sont en fait les antibiotiques eux-mêmes qui
provoquent la synthèse de l'enzyme bactérienne qui capture les gènes de résistance et permet leur expression dans l'intégron.
Cette enzyme favorise en outre le réagencement, au hasard, des gènes de
résistance au sein de l'intégron. Or, l'ordre de ces gènes dans
l'intégron détermine le degré de priorité pour leur expression: les premiers sont les plus exprimés
et confèrent à la bactérie les résistances correspondantes. Les
derniers restent silencieux tout en étant néanmoins conservés, en
réserve. Lors d'un nouveau réagencement, déclenché par la prise d'un antibiotique par exemple, ils seront susceptibles de se retrouver dans les premières
positions, et d'apporter à la bactérie les résistances requises face à
ce médicament. Les bactéries qui possèdent alors la bonne "combinaison" de gènes pourront survivre et assurer le maintien du potentiel de résistances au fil des générations.
Ces travaux démontrent combien les stratégies d'adaptation bactériennes
face aux antibiotiques sont efficaces, aussi bien à court qu'à long
terme. Ils caractérisent ainsi précisément les contraintes liées à la
génétique des bactéries, que devront prendre en compte les mesures de
santé publique à venir pour lutter contre le problème des
multirésistances.