Du nouveau sur la chute de Neandertal
Par Benje le vendredi, septembre 18 2009, 20:13 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS
Des agressions par l’homme moderne et un éparpillement génétique pourraient expliquer l'extinction de Neandertal.
Qui était donc Homo neanderthalensis, l'homme préhistorique de Neandertal ? Deux équipes comprenant des chercheurs du CNRS viennent de publier coup sur coup des études qui permettent de mieux
comprendre ce représentant fossile du genre Homo. Espèce bien distincte
de notre ancêtre Homo sapiens, celle-ci a vécu en Europe et en Asie occidentale entre 250 000 et 28 000 ans, environ, avant le présent.
Effectuée par une équipe internationale menée par
Fernando Ramirez Rozzi, du laboratoire "Dynamique de l'évolution
humaine: individus, populations, espèces" du CNRS, à Paris, la première de ces recherches suggère que les relations entre l'homme de Neandertal et l'homme moderne (Homo sapiens)
n'étaient pas au beau fixe... puisqu'elle fait état d'agressions du
premier par le second ! Réalisée par les chercheuses marseillaises
Silvana Condemi, Anna Degioanni et Virginie Fabre, du laboratoire
"Anthropologie bioculturelle", à Marseille, la deuxième étude, elle,
confirme l'existence de trois sous-groupes de néandertaliens différents
génétiquement. Fondamentaux, ces deux résultats pourraient permettre de
mieux saisir les raisons de l'extinction de l'homme de Neandertal il y
a environ 30 000 ans, avant que l'Homo sapiens le remplace définitivement en Europe.
"Surprenants, nos résultats suggèrent que les néandertaliens ont été en
contact avec les premiers représentant des hommes modernes ; et ces
derniers semblent avoir rapporté des corps de néandertaliens dans leur
caverne pour les manger...", précise Fernando Ramirez Rozzi. Pour
parvenir à cette conclusion, le paléoanthropologue, spécialiste du
développement dentaire, et son équipe ont analysé des fossiles trouvés
sur le site préhistorique des "Rois", à Moutiers (Charente) dans le
Sud-Ouest de la France, un foyer de la culture aurignacienne, la
première culture attribuée à Homo sapiens.
Les fossiles étudiés correspondent à deux fragments de mâchoire
inférieure et à des dents isolées. En analysant la croissance de ces
dents, les chercheurs ont pu identifier que l'une des mandibules
appartenait à un homme moderne alors que l'autre provenait très
probablement d'un néandertalien. Or, "point important: sur la mâchoire
que l'on pense provenir d'un homme de Neandertal, on observe des
marques de coupures similaires à celles laissées sur les mandibules
d'animaux abattus par les hommes modernes, comme le renne. D'où notre
conclusion que les néandertaliens ont pu être mangés par les humains",
continue le paléoanthropologue.
"Pour ce qui est de nos travaux, pour la première fois nous avons
essayé d'en savoir plus sur l'homme de Neandertal sans le comparer à
l'homme moderne mais en faisant une analyse génétique à l'intérieur de
la population même", enchaîne la chercheuse marseillaise Silvana
Condemi. Ses collègues et elle ont tenté de savoir si Homo neanderthalensis,
qui occupait une vaste région allant de l'Atlantique à la Sibérie,
constituait une population homogène ou s'il formait plusieurs groupes
distincts.
Sur des bases anatomiques, comme par exemple la dimension des dents, plus grandes dans le Nord de l'Europe, les paléoanthropologues envisageaient déjà que les
néandertaliens se divisaient en sous-groupes: un en Europe occidentale,
un autour de la Méditerranée et un dernier au Proche-Orient. Pour
confirmer cette hypothèse, l'équipe a recouru à des logiciels
informatiques permettant de modéliser l'évolution démographique et
génétique de la population néandertalienne à partir de quinze fragments
d'ADN provenant de douze néandertaliens et décodés depuis 1997.
Au final, les chercheuses ont pu établir l'existence des trois
sous-groupes dans la population néandertalienne (un occidental, un
méditerranéen et un oriental). Elles suggèrent même l'existence d'un
quatrième en Asie occidentale. Les petites variations génétiques de ces
différents groupes seraient dues à une microévolution induite par
l'environnement où chacun des groupes vivait. L'existence d'une telle
subdivision génétique, avec peu de migrations entre les sous-groupes,
pourrait avoir fragilisé les néandertaliens et favorisé leur extinction
lorsque chaque population s'est vue soumise à une concurrence – parfois
violente – avec l'Homo sapiens.