Source: CNRS

Une équipe de chercheurs de l'INRA basée à Evry (Unité mixte de recherche "Génomique végétale» INRA-CNRS-Université d'Évry) vient de démontrer le mécanisme génétique par lequel chez le melon, une fleur mâle devient femelle. La plupart des plantes à fleurs ont des fleurs hermaphrodites, qui possèdent à la fois les organes sexuels mâle et femelle. Cependant, plus de 4000 espèces, dont le melon, développent des fleurs unisexuées, uniquement mâles ou femelles. Les chercheurs viennent d'élucider le mécanisme par lequel ces fleurs unisexuées se forment. Ils ont identifié un gène impliqué dans le contrôle de la formation des organes femelles.

L'étude des gènes gouvernant le déterminisme du sexe chez le melon est de grande importance agronomique. Elle pourrait en effet conduire à une meilleure productivité en favorisant la formation de fleurs femelles à l'origine de la production de fruits. L'ensemble de ces résultats est publié en ligne sur le site de la revue Nature.

Le déterminisme du sexe du melon est gouverné par deux gènes, andromonoecie (A) et gynoecie (G). De leurs multiples interactions découle une distribution de différents types sexuels. Ainsi, en fonction du brassage génétique intervenant à chaque génération, les plantes peuvent être porteuses de fleurs mâles et de fleurs femelles, ou porteuses de fleurs mâles et de fleurs hermaphrodites, ou bien porteuses de fleurs femelles uniquement, ou encore de fleurs hermaphrodites.

Le déterminisme du sexe chez le melon conduit au développement de fleurs unisexuées ou hermaphrodites à partir d'une ébauche florale bisexuée. Dans une précédente publication, les chercheurs avaient caractérisé le gène A qui code une enzyme active au cours du développement des fleurs femelles, et impliquée dans la synthèse d'éthylène, une hormone connue pour modifier le déterminisme du sexe. Ils avaient démontré qu'une mutation dans ce gène A, acquise au cours de l'évolution, entraînait l'inactivation de l'enzyme et le développement d'organes mâles dans les fleurs femelles et donc de fleurs hermaphrodites.

Après avoir étudié les variations naturelles de la région génomique qui gouverne la gynoecie (l'apparition de plantes entièrement femelles), dans 500 variétés de melon provenant de toutes les parties du monde, les chercheurs publient aujourd'hui des travaux qui explicitent la formation de fleurs femelles chez le melon et plus largement le ballet des interactions entre les gènes A et G à l'origine du sexe chez le melon. Les chercheurs démontrent ici qu'une mutation à proximité du gène G, trouvée dans l'une des variétés collectées, entraine des modifications épigénétiques (une mutation épigénétique est une mutation qui ne change pas la séquence de l'ADN; dans ce cas précis, la mutation est induite par l'insertion d'un élément transposable; ces éléments sont des séquences d'ADN mobiles présentes dans tous les organismes vivants; leur capacité à se déplacer dans le génome peut conduire à des mutations génétiques ou à des modifications épigénétiques de l'expression des gènes voisins) et réprime l'expression de celui-ci, permettant ainsi la formation des organes femelles. L'inhibition de l'expression du gène A par le gène G est à son tour levée et les organes mâles ne se développent pas. Il se forme alors une fleur femelle.

Ces résultats revêtent une grande importance sur le plan agronomique, la production plus importante de plantes femelles (à l'origine de la formation des fruits) permettant ainsi d'améliorer la productivité. Ils permettent d'envisager le contrôle du développement des fleurs chez le melon, mais également chez d'autres espèces. Ces travaux mettent également en lumière des mécanismes épigénétiques originaux impliqués dans l'évolution des plantes.