Une nouvelle technique d'IRM pour une meilleure compréhension des maladies neurodégénératives
Par Benje le vendredi, avril 16 2010, 09:05 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS
Une méthode prometteuse d'imagerie par résonance magnétique (IRM) vient d'être mise au point par des chercheurs français du Centre de résonance magnétique biologique et médicale, en collaboration avec le CHU de La Timone à Marseille et le CEMEREM. Elle permet de cartographier de manière non invasive la distribution en sodium dans le cerveau humain. L'enjeu est de taille car l'accumulation anormale de cet élément dans l'axone, partie du neurone où circule l'information nerveuse, intervient dans plusieurs maladies neurodégénératives, comme la sclérose en plaques ou la maladie d'Alzheimer. A terme, cette technique pourrait permettre de tester des médicaments potentiels agissant sur le sodium mais également de mieux comprendre les phénomènes intervenant dans certaines pathologies neurologiques, voire de les dépister.
L'imagerie par résonance magnétique (IRM)
traditionnelle est basée sur l'excitation des noyaux d'hydrogène portés
par les molécules d'eau. Les atomes d'hydrogène sont
présents partout dans notre corps, dans l'eau, qui constitue notre
organisme à plus de 60% et dans les graisses, en quantités différentes
selon les tissus. Conçue dans les années 80, cette technique non
invasive permet de distinguer les tissus du corps humain et de révéler, à
un stade précoce, certaines anomalies invisibles à ce stade en radiographie
"classique", en échographie ou avec un scanner X.
Faire de l'IRM avec d'autres atomes que l'hydrogène, tel est l'un des
paris que s'est lancé en 2008 l'équipe dirigée par Patrick Cozzone au
Centre de résonance magnétique biologique et médicale (CRMBM,
CNRS/Université de la Méditerranée), en collaboration avec le CHU de La
Timone à Marseille et le Centre d'exploration métabolique par résonance magnétique. Ce n'est pas un hasard si les chercheurs ont
choisi le sodium. Chez l'Homme, cet atome joue un rôle primordial dans les processus de dégénérescence de l'axone,
qui constitue la fibre nerveuse du neurone. Ces
phénomènes interviennent dans plusieurs pathologies neurologiques comme
la sclérose en plaques, l'épilepsie ou la maladie d'Alzheimer. D'où
l'idée de cartographier le sodium au sein de l'axone, et plus largement
dans le cerveau, en développant une nouvelle technique d'IRM reposant
sur cet élément.
La chose est loin d'être aisée, car le sodium est beaucoup moins
sensible que l'hydrogène (le signal émis est 20000 fois plus faible). De
plus, les scientifiques ont du imaginer des dispositifs innovants pour
récupérer le signal émis ainsi que des algorithmes spécifiques pour le
traiter. Pour cela, ils se sont appuyés sur l'équipement de dernière
génération du CEMEREM, en particulier sur un appareil Verio Siemens doté
d'un aimant à champ magnétique élevé (3
Teslas). C'est grâce à une collaboration pluridisciplinaire réunissant
des physiciens, des biologiques et des médecins que cette méthode d'IRM
cérébrale du sodium a été mise en œuvre. Seuls cinq centres de
recherches ont très récemment réussi à maîtriser l'IRM cérébrale du
sodium chez l'Homme: il s'agit de quatre équipes américaines et d'une
allemande. Désormais, la France bénéficie elle aussi d'une expertise en
la matière.
"Une cartographie in vivo de la distribution des atomes de sodium dans
le cerveau humain a ainsi pu être obtenue", précise Patrick Cozzone. Les
premiers tests ont été effectués chez des sujets sains. Surtout,
l'équipe vient d'être autorisée à tester le dispositif chez des patients
souffrant de sclérose en plaques au stade le plus précoce. Ce protocole
de recherche, qui vient d'être approuvé
par le Comité de protection des personnes (CRPP), vise à détecter et
caractériser les processus provoquant une dégénérescence axonale.
À l'avenir, l'IRM cérébrale du sodium pourrait permettre d'évaluer en
direct et in vivo des traitements potentiels visant à limiter
l'accumulation du sodium intra-axonal, mais également de mieux
comprendre les phénomènes en jeu dans les maladies neurologiques comme
la sclérose en plaques, la maladie d'Alzheimer et l'épilepsie.