Cancer et vieillissement: nouvelles propriétés des cellules souches adultes
Par Benje le jeudi, juin 3 2010, 19:52 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: Université libre de Bruxelles, ULB
Des chercheurs de l’Université Libre de Bruxelles (ULB) découvrent de
nouvelles propriétés des cellules souches adultes en réponse aux
dommages à l’ADN. Ces découvertes ont d’importantes implications dans la
compréhension des mécanismes de cancérisation et du vieillissement.
Les cellules souches adultes sont à la base de la régénération et de la
réparation tissulaire, fournissant de nouvelles cellules pour remplacer
les cellules mortes ou endommagées. Étant donné que les cellules souches
résident dans les tissus durant de longues périodes, elles présentent
des risques importants d’accumuler des mutations qui peuvent mener au
développement des cancers ou au vieillissement. La manière selon
laquelle les cellules souches perçoivent et répondent aux dommages de
leur ADN n’est pas bien connue.
Panagiota Sotiropoulou et Aurélie Candi, deux
chercheuses dans le groupe de Cédric Blanpain, chercheur FNRS/FRS à
l’IRIBHM, Université libre de Bruxelles, Belgique,
ont défini les conséquences fonctionnelles et les mécanismes
moléculaires par lesquels les cellules souches du follicule pileux
répondent aux dommages à l’ADN in vivo. Elles ont montré que les
cellules souches adultes de la peau sont extrêmement résistantes à la
mort cellulaire (apoptose) induite par les dommages à l’ADN.
Afin de disséquer les mécanismes moléculaires à la base de cette
nouvelle caractéristique des cellules souches adultes, les chercheurs
ont utilisé une variété de techniques dont une caractérisation
biochimique et transcriptionnelle des cellules souches avant et après
exposition aux dommages de l’ADN, et ont démontré que deux mécanismes
moléculaires importants contribuent à la résistante plus élevée des
cellules souches du follicule pileux à la mort cellulaire induite par
les dommages de l’ADN. Les cellules souches du follicule pileux
expriment la protéine anti-apoptotique Bcl-2 à de plus haut niveau, ce
qui contrecarre les effets des gènes stimulant la mort cellulaire
induits par les dommages à l’ADN.
Le deuxième mécanisme permettant la résistance accrue des cellules
souches du follicule pileux aux dommages à l’ADN est lié à la
temporalité d’activation du “gardien du génome” appelé p53. L’activation
de p53, qui induit l’activation de la mort cellulaire programmée quand
les dommages à l’ADN sont trop étendus, est de beaucoup plus courte
durée dans les cellules souches du follicule pileux. Les chercheurs ont
trouvé que l’activité plus transitoire de p53 est corrélée à une
réparation beaucoup plus rapide de l’ADN dans les cellules souches du
follicule pileux. Les souris qui sont déficientes dans la réparation de
l’ADN, présentent une expression de p53 plus longue durée résultant en
une mort cellulaire accrue dans les cellules souches du follicule pileux
suite aux dommages de leur ADN.
Les résultats de cette étude démontrent que la résistance aux dommages à
l’ADN et la réparation de l’ADN plus rapide représentent deux nouvelles
caractéristiques des cellules souches adultes. D’autres études seront
nécessaires pour déterminer dans quelle mesure ces caractéristiques
représentent un mécanisme général partagé par différents types de
cellules souches adultes. Ces résultats montrent également que les
cellules souches du follicule réparent leur génome à l’aide d’un
mécanisme de réparation de l’ADN connu pour induire des erreurs lors de
la réparation, pouvant donc mener à long terme à l’accumulation de
mutations dans les cellules souches, et suggérant que ce mécanisme
pourrait être à double tranchant pour les cellules souches adultes,
favorisant d’une part la survie à court terme des cellules souches après
exposition aux dommages à l’ADN au dépend de la maintenance de
l’intégrité génomique à long terme.
“Quand on pense à l’évolution, ce
mécanisme de protection des cellules souches a beaucoup de sens. Il y a
plusieurs centaines d’années, le vieillissement et le cancer ne
représentaient pas un problème de survie pour l’homme, pour lequel
l’espérance de vie ne dépassait pas 30 ans. Il était bien plus important
de protéger les cellules souches de la mort cellulaire que d’éviter de
nouvelles mutations dans leurs génomes” souligne Panagiota Sotiropoulou,
premier auteur de cette étude. Ces résultats ont d’importantes
implications dans la compréhension de la sensibilité accrue de certains
tissus à la cancérisation induite par les dommages à l’ADN et au
vieillissement.
Cette étude est publiée online ce 16 mai et dans l’issue de juin
de Nature Cell Biology