Source: Université McGill (William Raillant-Clark, Service des relations avec les médias - Tél.: 514-398-2189)

Les découvertes d'un linguiste de l'Université McGill de Montréal montrent comment les langages diffèrent lorsqu'il est question d'accentuer une syllabe ou un mot.

Une meilleure compréhension de la manière dont nous utilisons les signaux acoustiques pour attirer l'attention sur de nouveaux renseignements et mettre de côté les anciens pourrait aider les programmeurs informatiques à produire une voix plus réaliste. Le professeur Michael Wagner, chercheur au Département de linguistique de McGill, a comparé la manière dont les francophones et les anglophones évaluent la poésie, pour prouver qu'il existe une différence systématique dans la façon dont les deux langues utilisent ces signaux. "La voix synthétique est aujourd’hui assez impressionnante en termes de prononciation de mots individuels", a expliqué monsieur Wagner. "Mais lorsqu'un ordinateur “ parle “, les phrases complètes semblent encore artificielles en raison de la manière complexe dont nous en accentuons certaines parties, selon le contexte et le message que nous voulons transmettre."

Une première étape vers la compréhension de cette complexité consiste à perfectionner nos connaissances sur la manière dont nous décidons où mettre l’accent dans une phrase. Et c'est là qu'entre en jeu la poésie. Le professeur Wagner a examiné la prosodie, c'est-à-dire le rythme, l'accent et l'intonation de la voix. La poésie dépend lourdement de la prosodie, et en comparant l'anglais et le français, il a pu découvrir comment celle-ci fonctionne différemment dans ces deux langues.

En travaillant avec Katherine McCurdy à l'Université Harvard, Michael Wagner a récemment publié le résultat d'une recherche qui se penche sur l'utilisation des rimes identiques dans chaque langue. "Ce sont des rimes dans lesquelles les syllabes accentuées ne font pas que rimer; elles sont identiques, comme écrire/rire ou attire/retire", a-t-il expliqué. "C'est courant en poésie française, alors qu'en anglais, on considère cette pratique comme non conventionnelle, voire inacceptable." Le professeur Wagner a donné l'exemple suivant, tiré d'un ouvrage de John Hollander:

The weakest way in which two words can chime
Is with the most expected kind of rhyme —
(If it’s the only rhyme that you can write,
A homophone will never sound quite right.)


L’étude indique que les rimes identiques s’insèrent dans un modèle général qui s’applique également à l’extérieur de la poésie. Même lorsque des mots répétés diffèrent en signification et se prononcent pratiquement de la même façon, l’information répétée devrait être réduite acoustiquement, sans quoi elle semblera vraiment étrange. "L'anglais utilise la prosodie d'une manière un peu embêtante", dit-il, "mais qui ne constitue que rarement un problème, parce que cela se produit peu fréquemment dans le discours naturel". À l'heure actuelle, le professeur Wagner travaille à un modèle qui effectue de meilleures prédictions sur l'endroit où mettre l’accent dans une phrase, en fonction du contexte. Financées par le Fonds de recherche sur la société et la culture du Québec et une subvention de la Chaire de recherche du Canada en traitement de la voix et du langage, ses découvertes ont été publiées dans le journal Cognition.