Auteurs de l'article: Cédric DEPOND & Adrien BERNARD

La NASA a annoncé mardi dernier une conférence de presse sur une découverte majeure en astrobiologie. Cette découverte était décrite comme ayant "un impact sur la recherche des preuves de l'existence d'une vie extraterrestre". Depuis, les plus folles rumeurs circulent sur le net. Rassurez-vous tout de suite: non, les martiens ne sont pas encore venus nous rendre visite ! Mais la découverte est tout de même très étonnante...

La conférence de presse a eu lieu jeudi soir (20h heure française). La NASA a annoncé la découverte d’un organisme vivant différent, le premier connu possédant une chimie alternative. Et c’est sur Terre, au sein du lac Mono en Californie, que cet organisme "extra-organique" a été découvert. Il s’agit d’une bactérie baptisée GFAJ-1, membre du groupe Gammaproteobacteria. Sur les 6 éléments de base de la chimie organique, la bactérie remplace dans sa chimie le phosphore par un autre élément: l’arsenic.

Tous les êtres vivants connus, de la plus petite bactérie au plus gros animal ou végétal, sont constitués de 6 éléments de bases: le carbone, l'hydrogène, l'azote, l'oxygène, le phosphore et le soufre. Ces éléments permettent la mise en œuvre de la chimie organique, et la construction des briques de base de la vie telle que l’ADN. Aucun organisme vivant connu ne dérogeait à cette règle, aussi extrême soit-il, de sorte que les scientifiques s’en servaient de référence pour la recherche d’une vie extraterrestre éventuelle, jusqu’à maintenant.

Trois chercheurs sont à l'initiative de ces travaux: Mme Wolfe-Simon, chercheuse à l'USGS en astrobiologie, Ariel Anbar, de l'Université de l'Arizona et Paul Davies. Ces trois chercheurs avaient déjà publié en 2009 des travaux soumettant l'idée que l'arsenic puisse se substituer au phosphore dans des formes de vie. En effet, l'arsenic est très proche du phosphore dans le tableau périodique des éléments. C'est en faisant suite à cette hypothèse que Madame Wolfe-Simon a souhaité expérimenter sa théorie en Californie, au lac Mono qui présente la particularité d'avoir un taux très élevé de sel et d'arsenic.

Elle a donc prélevé des sédiments et s'aperçut qu'une bactérie avait effectivement survécu à la présence d'arsenic. Il s'agit de la bactérie GFAJ-1, déjà connue. Après une analyse plus poussée, les chercheurs se sont rendu compte que non seulement elle avait survécu à l'arsenic, mais également qu'elle en vivait ! Cette bactérie a incorporé l'arsenic dans son ADN afin d'en faire un des facteurs de son propre développement.

Le phosphore est utilisé pour la constitution de l’ADN et de l’ARN, supports de l’information génétique au sein des cellules vivantes. C’est également un élément constituant l’ATP, molécule indispensable permettant l’apport en énergie des cellules. L’arsenic est un poison pour la plupart des êtres vivants car sa constitution lui permet de prendre la place du phosphore dans l’organisme, engendrant un grave malfonctionnement des cellules. Le microorganisme découvert par l’équipe de chercheurs ne se contente pas d’être résistant aux effets indésirables de l’arsenic, mais l’intègre directement comme partie de lui-même, comme composant de base de sa propre chimie.

Une découverte qui éclaire d’une lumière nouvelle la biologie, avec en ligne de mire l’astrobiologie: une preuve de l’incroyable capacité d’adaptation de la vie à prendre en compte pour la recherche d’une éventuelle vie extraterrestre. Les planètes susceptibles d’accueillir la vie pourraient voir prochainement leur nombre s’accroitre sensiblement.