Longévité et nutrition: un ver vit plus longtemps grâce à son régime alimentaire
Par Benje le mercredi, février 2 2011, 00:40 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS
Pour allonger la durée de vie de tous les organismes, depuis la levure jusqu'aux primates, les scientifiques emploient une méthode expérimentale universellement reconnue: le régime alimentaire (1). A Lyon, l'équipe de Marc Billaud et Florence Solari, du Centre de Recherche sur le Cancer
de Lyon (CNRS/Inserm/université Lyon 1/centre Léon Bérard) vient de
mettre en évidence les mécanismes qui permettent au ver C.elegans
soumis à un régime strict de vivre 40% plus longtemps. Ces mêmes
mécanismes pourraient également être impliqués dans la protection contre
le cancer. Ce travail est publié dans le numéro de février de la revue Aging Cell.
Les études sur la longévité montrent que parmi les facteurs qui
influencent l'espérance de vie d'un individu, 70% d'entre eux seraient
liés à son environnement
et son mode de vie. C'est le cas du régime alimentaire qui consiste à
réduire l'apport en nourriture sans dénutrition. De plus, ce régime
préviendrait le développement de cancers. Il existerait donc des
mécanismes communs au contrôle de la longévité et au développement des tumeurs.
Depuis plusieurs années, Marc Billaud, Florence Solari et leurs
collaborateurs étudient les mécanismes impliqués dans la modulation de
la longévité et leurs liens avec le cancer. Les chercheurs utilisent
pour cela l'organisme modèle Caenorhabditis elegans. Ce petit ver
a permis par le passé de faire des découvertes pionnières dans la
description des voies de signalisation impliquées dans la longévité,
voies dont le rôle s'est avéré conservé chez les mammifères.
Dans cette étude, les chercheurs ont isolé, chez C.elegans, de nouveaux "gérontogènes" (2).
Parmi eux: le gène slcf-1 dont l'inhibition produit des effets
bénéfiques sur la longévité, effets qui sont similaires à ceux observés
lorsque l'apport en nourriture est limité. Ils ont montré que la
limitation de l'apport alimentaire chez C.elegans provoque l'inhibition
de l'expression du transporteur SLCF-1 dans les cellules intestinales et
déclenche une augmentation du niveau de pyruvate. Celle-ci altère le
métabolisme mitochondrial et induit un stress oxydant.
Ce stress de faible intensité induit une réponse adaptative responsable
de l'augmentation de la durée de vie. Les mêmes effets sont retrouvés
lorsque le gène slcf-1 est inactivé (pas de production du transporteur
SLCF-1) et bien que l'apport en nourriture ne soit pas limité.
Ce travail a permis de révéler l'importance du métabolisme du pyruvate
dans le contrôle de la durée de vie en conditions de restriction
calorique. Il montre de plus qu'une protéine connue pour avoir des
effets suppresseurs de tumeurs (la protéine PTEN) se trouve également
impliquée dans la cascade d'événements décrits ci-dessus.
"Il serait envisageable de tester dans des modèles animaux, en
particulier chez les mammifères, si la simple addition de pyruvate à la
nourriture mimerait la restriction calorique avec les effets bénéfiques
sur l'état de santé et celui sur la diminution d'incidence des cancers",
précisent les auteurs.
Notes:
(1) Le régime alimentaire consiste à réduire l'apport en nourriture sans dénutrition.
(2) Gène impliqué dans les processus de vieillissement.