Source: CNRS-INSB

La greffe de neurone dopaminergiques est une méthode de traitement utilisée dans le traitement de la maladie de Parkinson. Dans un article de revue publié dans Trends in Neurosciences, deux chercheurs de l'Institut de Physiologie et Biologie Cellulaires mettent en lumière une piste alternative dans le domaine de la greffe cellulaire, celle de la transplantation homotopique, qui consiste à transplanter les cellules dans les régions dégénérées et non dans les structures cibles. Les scientifiques font alors état des derniers travaux qui montrent que le cerveau adulte est permissif à la repousse axonal des neurones transplantés, d'une manière spécifique et à grande distance, avec une amplitude non soupçonnée auparavant.

La maladie de Parkinson est une maladie neurodégénérative, qui apparaît habituellement entre 45 et 70 ans. Elle est principalement caractérisée par la mort d'un groupe restreint de neurones, les neurones à dopamine, au sein d'une petite région du cerveau, la substance noire. Les neurones de cette région émettent des projections touchant le striatum, formé par le noyau caudé et le putamen. Ces structures font partie d'un ensemble plus vaste de structures corticales et sous-corticales, appelées ganglions de la base.

Les traitements pharmacologiques qui existent contre la maladie doivent généralement être administrés sur un long terme, ce qui induit une baisse progressive de leur efficacité et des effets secondaires indésirables. D'autres approches ont alors été développées, comme par exemple les transplantations de cellules embryonnaires dans le striatum. À ce jour, plus de 500 patients dans le monde ont déjà bénéficié de cette procédure thérapeutique. Des études cliniques ont pu montrer que les malades parkinsoniens qui ont reçu une transplantation striatale, ont présenté une réduction d'environ 30% du déficit dopaminergique et une diminution importante des troubles moteurs. Néanmoins, les améliorations obtenues sont limitées et peuvent êtres transitoires dans l'état actuel de la technique.

La greffe cellulaire dans la maladie de Parkinson est essentiellement pratiquée dans le striatum, structure cible, et non dans la substance noire, structure dégénérée, car on pensait que les neurones greffés étaient incapables d'émettre des axones à longue distance au sein du cerveau adulte pour atteindre la cible. La revue rédigée par Afsaneh Gaillard et Mohamed Jaber, de l'Institut de Physiologie et Biologie Cellulaire (IPBC), est justement consacrée à cette question. Elle reprend des travaux récents, parmi lesquels on trouve ceux d'Afsaneh Gaillard et son équipe, qui montrent que le cerveau adulte est permissif à la repousse axonale : les neurones embryonnaires transplantés sont capables d'étendre des prolongements à plus longue distance que ce que les chercheurs supposaient initialement. A partir de ces résultats, les auteurs proposent donc de réaliser les greffes cellulaires non pas dans le striatum, mais directement au sein de la structure lésée, la substance noire.

La greffe intranigrale plutôt qu'intrastriatal semble présenter de nombreux avantages dans la maladie de Parkinson. En transplantant les neurones dopaminergiques dans la substance noire, les cellules pourraient rétablir la connectivité physiologique nigro-striatale et le greffon pourrait exercer une influence neurotrophique bénéfique sur les neurones endommagés ou encore intacts, au sein de la structure dégénérée. En effet, les chercheurs ont démontré chez le rongeur, modèle animal de la maladie de Parkinson, que les neurones transplantés dans la structure lésée parviennent à atteindre leur cible striatale, augmentent les niveaux de dopamine manquants et corrigent les déficits moteurs observés chez l'animal après la lésion. Ces travaux sont à rapprocher d'autres résultats, obtenus dans un modèle de lésion du cortex où, la aussi, des neurones embryonnaires greffés au sein du cortex moteur lésé sont capables d'envoyer des axones à très longue distance et d'une manière physiologiquement appropriée, vers les structures cibles.

Jusqu'à présent les cellules neuronales utilisées dans la transplantation sont issues d'embryons avortés, ce qui pose certains problèmes éthiques, logistiques, politiques et médicaux. En collaboration avec l'équipe de Pierre Vanderhaeghen à l'Institut de Recherche Interdisciplinaire en Biologie Humaine et Moléculaire en Belgique, Afsaneh Gaillard a réussi à obtenir des neurones corticaux à partir de cellules souches, et ces cellules se sont elles aussi avérées capables, après greffe, de projeter des axones vers des structures cibles corticales et sous-corticales.

L'ensemble de ces travaux ouvre la possibilité de réparer les structures lésées au fur et à mesure que la maladie de Parkinson s'installe et de rétablir une connectivité plus proche de la normale dans le cerveau adulte. Cette nouvelle approche devrait améliorer la survie du greffon et rétablir de manière physiologique les voies dégénérées, mais également protéger les cellules restantes de la progression de la pathologie. Néanmoins, ces résultats ont été obtenus chez les rongeurs. Il faudrait maintenant les reproduire dans des modèles animaux plus proches de l'homme, tel que le singe, avant d'envisager des applications chez l'homme.