Cellules: liaison mortelle
Par Benje le dimanche, avril 17 2011, 01:20 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: Jean Hamann - Université Laval
Des chercheurs de la Faculté de médecine ont découvert que le couplage de deux molécules agit comme un commutateur de mort cellulaire.
Un nouveau rouage du mécanisme de la mort cellulaire vient d'être
découvert par des chercheurs de la Faculté de médecine et de la Johns
Hopkins University School of Medicine. Cette découverte, publiée le 5
avril dans la revue scientifique Science Signaling par
Jean-Francois Haince, Guy Poirier et l'équipe de Ted et Valina Dawson,
constitue un pas de plus vers l'utilisation thérapeutique de ce
mécanisme pour lutter contre les maladies neurodégénératives et les
cancers. Le potentiel de cet outil est énorme puisque sa
maîtrise permettrait aussi bien de protéger des cellules saines que de
provoquer la mort de cellules indésirables.
La mort cellulaire résulte d'une cascade de réactions qui s'enclenche
après l'exposition à des substances toxiques ou à d'autres agents
stressants pour la cellule. La poly-ADP-ribose polymérase-1 (PARP-1) est
une enzyme qui intervient tôt dans ce processus. En conditions
normales, son rôle est positif puisqu'elle répare les bris dans les
brins d'ADN. Par contre, lorsqu'un stress cause sa suractivation, cette
enzyme peut littéralement se tuer à l'ouvrage, épuisant les réserves
énergétiques d'ATP de la cellule et l'entraînant dans la mort.
Les chercheurs connaissaient déjà deux étapes clés de la mort
cellulaire: la formation du polymère PAR, synthétisé par PARP-1, qui
indique que le processus est enclenché, et la migration du facteur
d'induction de l'apoptose (AIF) des mitochondries vers le noyau. L'AIF a
deux fonctions connues dans la cellule: il intervient dans la
production d'énergie dans les mitochondries ainsi que dans la
dégradation de l'ADN dans le noyau. «Depuis quelques années, on
soupçonnait qu'il y avait un lien entre le polymère PAR et l'AIF,
souligne Guy Poirier. Notre papier démontre pour la première fois, chez
des animaux de laboratoire, qu'il doit y avoir liaison entre les deux
pour que la mort cellulaire se produise.»
À la lumière des travaux réalisés par ces chercheurs, les grandes étapes
du mécanisme de mort cellulaire lié à la PARP-1, nommée parthanatose,
se résument commet suit. Lorsqu'un stress cellulaire affectant l'ADN
survient, la PARP-1 est suractivée et elle produit davantage de polymère
PAR. Ce polymère sort du noyau et se rend jusqu'aux mitochondries où il
se lie à l'AIF, provoquant sa libération des mitochondries et sa
migration vers le noyau où il dégrade l'ADN. Les chercheurs ont montré
qu'en induisant une mutation qui empêche la liaison entre les deux
molécules, l'AIF n'est pas libéré par les mitochondries et il n'y a pas
de mort cellulaire, même lorsque PARP-1 est suractivée.
Les chercheurs entrevoient la possibilité de recourir à des produits qui
stimulent la libération d'AIF des mitochondries pour favoriser la
destruction de cellules cancéreuses. À l'inverse, les composés qui
empêchent la liaison entre l'AIF et le polymère PAR pourraient être
utilisés, de façon préventive, pour protéger les cellules contre la mort
cellulaire. «Cette approche risque d'entraver le mécanisme de
réparation des bris d'ADN, mais lorsqu'on a affaire à une maladie comme
l'alzheimer pour laquelle il n'existe pas de traitement efficace, il
faut choisir le moindre des deux maux», fait valoir le professeur
Poirier.