Les génomes des champignons responsables de la rouille noire du blé et de la rouille foliaire du peuplier ont été décryptés et analysés par un consortium international associant des chercheurs de l'INRA et du CNRS entre autres. Cette analyse met en évidence la présence d'un grand nombre de gènes chez ces deux champignons pathogènes, jusqu'ici encore jamais identifiés chez d'autres espèces. Ces gènes permettent la synthèse de protéines utilisées par les champignons pour neutraliser le système immunitaire de leurs hôtes respectifs. Ces nouvelles données seront utiles pour identifier les facteurs permettant aux rouilles de contourner les résistances à la maladie chez le blé et le peuplier. L'ensemble de ces résultats est publié dans l'édition en ligne avancée de la revue PNAS du 2 Mai 2011.

Comprendre les caractéristiques biologiques des propriétés invasives des champignons pathogènes des plantes permet à terme d'envisager des solutions plus durables pour s'en débarrasser. Causées par différentes espèces de champignons microscopiques, les maladies communément appelées "rouilles" causent des dégâts conséquents chez de nombreuses plantes d'importance agronomique, comme le blé, le soja, le caféier ou encore le peuplier. Dans une nouvelle étude, un consortium international de chercheurs qui associe notamment les centres INRA de Nancy et de Versailles, l'université Henri Poincaré – Nancy 1 ainsi qu'une équipe mixte CNRS/Université d'Aix-Marseille a séquencé et réalisé une analyse comparative des génomes de la rouille du blé et du peuplier. Ces maladies sont causées par des champignons dits biotrophes (1), c'est-à-dire qu'ils se nourrissent de leurs plantes hôtes tout en les maintenant en vie. Ces champignons affaiblissent fortement les plantes attaquées et causent des baisses importantes de rendements en culture. La croissance et la reproduction des rouilles sont entièrement dépendantes des plantes dont ils sont pathogènes.

Le séquençage des génomes des champignons responsables de la rouille noire du blé (Puccinia graminis f. sp. tritici) et de la rouille foliaire du peuplier (Melampsora larici-populina) livre des résultats majeurs pour la compréhension du caractère parasitaire de la rouille. Ainsi, les génomes des rouilles ont des tailles importantes et un très grand nombre de gènes (plus de 16000 chez les deux champignons). Parmi ceux-ci, plus de la moitié correspondent à de nouveaux gènes non identifiés auparavant chez d'autres pathogènes des plantes. Notamment, les génomes des rouilles présentent la particularité de pouvoir synthétiser plus d'un millier de protéines (dont la majorité sont spécifiques aux rouilles), ayant le profil typique d'effecteurs. Ces effecteurs sont des petites protéines sécrétées qui permettraient de neutraliser les systèmes de défense des plantes lors de l'infection. Les génomes des rouilles Melampsora larici-populina et Puccinia graminis contiennent également une très large proportion d'éléments transposables (2). Ces derniers ont pu contribuer à des innovations chez les rouilles, notamment en favorisant la diversification de nouveaux gènes lors de la co-évolution avec les plantes-hôtes.

Les rouilles sont des maladies très difficiles à étudier du fait de leur mode de vie biotrophe obligatoire. Très peu de rouilles ont pu être isolées et maintenues artificiellement en laboratoire. Le séquençage de ces deux génomes constitue donc une avancée importante dans le domaine de la pathologie végétale du fait de l'importance des maladies des rouilles sur les plantes de grandes cultures d'intérêt agronomique. Ces résultats devraient permettre une meilleure compréhension des mécanismes permettant la mise en place de la biotrophie.