Source : de notre envoyé spécial au 47ème Congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO), Chicago, 3-7 juin 2011

« C’est un énorme pas en avant ». Chef du service de dermatologie à l’Institut Gustave Roussy (IGR) à Villejuif, le Dr Caroline Robert arbore un large sourire. Deux études présentées au 47ème congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) qui se déroule actuellement à Chicago (Etats-Unis), devraient profondément changer la prise en charge du mélanome métastatique avancé. Il s’agit d’une des formes de cancer les plus graves, contre laquelle les moyens de traitement sont très limités.

Un total de 675 patients dans 12 pays et 104 centres : l’étude BRIM3 a eu les honneurs de la séance plénière à l’ASCO. L’objectif principal de ce travail était d’évaluer la survie globale de patients atteints d’un mélanome métastatique avancé non opérable, et porteurs du gène BRAF. Celui-ci en effet est particulièrement impliqué dans la prolifération cellulaire anarchique qui caractérise un cancer.

Au cours de ce travail de phase 3, la moitié des patients a reçu le traitement standard par dacarbazine, une chimiothérapie intraveineuse. Les autres ont été traités par du vémurafénib par voie orale, une nouvelle molécule qui inhibe l’activité du BRAF.

L’espoir nommé vémurafenib

Pour les chercheurs, la première bonne nouvelle est venue du taux de réponse au traitement. Celui-ci, déterminé à partir du nombre de patients chez lesquels la tumeur a régressé, a été neuf fois plus élevé dans le groupe traité par vémurafénib’ (48,4% au lieu de 5,5%) ! Autre résultat marquant : à six mois, « 84% des patients sous vémurafénib étaient en vie contre 64%, dans le groupe ‘chimiothérapie’ », explique le Dr Robert.

Par rapport à la chimiothérapie de référence, le nouveau traitement a également permis une baisse de 74%, du risque d’aggravation de la maladie. Un indicateur important – défini par les spécialistes comme la survie sans progression de la maladie. En revanche, les effets secondaires ont été plus nombreux parmi les patients traités par la nouvelle molécule. Mais comme l’assure Caroline Robert, « nous sommes face à un profil de toxicité acceptable. Nous constatons vraiment que les patients se sentent mieux ».

Co-développé par Roche et Plexxikon, (groupe Daiichi Sankyo), le vémurafénib n’est pour l’heure commercialisé dans aucun pays. Des dossiers d’autorisation de mise sur le marché (AMM) sont actuellement en cours au sein des différentes agences sanitaires mondiales. En France, 700 patients pourraient potentiellement bénéficier de cette molécule. En avril dernier la commission d’AMM de l’Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé (AFSSaPS) a toutefois émis un avis favorable à sa mise à disposition précoce dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU). Pour l’heure, 61 malades sont ainsi traités gratuitement, comme c’est le cas en semblables circonstances.

Bons résultats pour l’association ipilimumab/chimiothérapie

La seconde étude marquante présentée à l’ASCO sur ce sujet, constitue davantage une confirmation qu’une nouveauté. Egalement coordonné en France par le Dr Caroline Robert, ce travail – baptisé IPI024 – a mis en avant les bénéfices de l’ipilimumab associé à une chimiothérapie (toujours par dacarbazine) en première ligne du traitement du mélanome avancé non-opérable.

L’ipilimumab est un anticorps monoclonal produit par le laboratoire Bristol-Myers-Squibb. Il vient d’être approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) dans la prise en charge du mélanome métastatique avancé. Mais il reste très surveillé en raison de ses effets secondaires. Dans IPI024, il a été comparé à une association chimiothérapie/placebo. Au final, au bout d’un an « 47% des patients sous ipilimumab/chimiothérapie étaient en vie contre 36% dans l’autre groupe. A trois ans, les proportions s’élevaient à respectivement 20,8% et 12,2% ».

Les résultats de ces deux études étaient particulièrement attendus à l’ASCO. Ils n’ont semble-t-il pas déçu les milliers de participants qui ont assisté à leur présentation. A l’image du Pr Jean-François Morère, (Hôpital Avicenne, Bobigny) pour qui « le mélanome métastatique n’ère plus dans un désert thérapeutique ».