Mieux comprendre la fonction des anticorps
Par Benje le dimanche, septembre 25 2011, 08:35 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS-INSB
Des chercheurs de l'Institut de génétique et de biologie moléculaire et
cellulaire (IGBMC, CNRS/Inserm/Université de Strasbourg) ont dévoilé un
nouveau mécanisme à l'origine de la diversification des anticorps et
donc de l'efficacité de notre système immunitaire. Ces résultats publiés
le 11 juillet 2011 dans Journal of experimental medicine permettraient de développer des vaccins plus efficaces mais aussi de nouvelles thérapies anti-cancéreuses.
Le système immunitaire possède de nombreuses cellules spécialisées qui
traquent et éliminent les microbes s'introduisant dans notre corps.
Parmi ces cellules, on trouve les lymphocytes B, qui constituent un type
de globules blancs particulièrement importants car ils produisent des
anticorps. Également appelées immunoglobulines, ces petites molécules
sont capables d'identifier les corps étrangers et de les détruire. Le
principe de la vaccination consiste justement à introduire un agent
pathogène rendu inoffensif dans l'organisme afin que ce dernier produise
des anticorps spécifiques de la maladie et soit plus réactif en cas de
réelle infection.
Le système immunitaire n'est donc pas entièrement acquis à la naissance
mais se met en place progressivement avec le temps. Chaque individu
détient d'abord un répertoire d'anticorps "de base", capable de limiter
l'invasion de notre organisme par des agents pathogènes. Cependant,
faire appel à ce répertoire est insuffisant ; celui-ci doit être
diversifié au cours des réponses immunes, afin d'augmenter la
spécificité et d'ajuster les fonctions protectrices des anticorps.
Ainsi, les mécanismes de diversification des immunoglobulines sont
essentiels à l'élimination des pathogènes et à la mise en place d'une
immunité spécifique, adaptée et de longue durée. L'enzyme AID ou
"Activation induced cytidine deaminase" se trouve être à l'origine de
ces mécanismes. Elle agit en introduisant des mutations et des cassures
ciblées au niveau des régions de l'ADN codant pour les anticorps. Ces
lésions augmentent la spécificité des anticorps en sélectionnant les
plus efficaces et en adaptant leur fonction.
Malgré son rôle clé dans la réponse immunitaire, l'activité d'AID peut
être dangereuse puisqu'elle provoque des cassures et des mutations dans
l'ADN. Si les dommages infligés par l'enzyme à l'ADN sont mal réparés,
ou si l'enzyme cible un autre endroit du génome, son activité peut
conduire à l'apparition de cancers. Une grande partie des lymphomes B
provient notamment d'un dérèglement de l'activité d'AID. Depuis de
nombreuses années, les chercheurs s'interrogent donc sur les processus
qui permettent à cette dernière de cibler spécifiquement les gènes
codant pour les anticorps, qui ne représentent pourtant qu'un infime
pourcentage du génome.
L'équipe de Bernardo Reina-San-Martin à l'IGBMC travaille depuis
plusieurs années sur les mécanismes de l'immunité. Dans leurs derniers
travaux, les chercheurs sont parvenus à montrer que l'AID s'associe avec
d'autres protéines pour constituer un complexe qui participe au
maintien de l'activité de l'enzyme sur les gènes des immunoglobulines.
Ces résultats, obtenus avec la collaboration du Howard Hughes medical
institute (HHMI, Boston, USA) et de la Harvard medical school (HMS,
Boston, USA), contribuent à faire avancer la compréhension des
mécanismes d'action d'AID. A terme, ils pourraient permettre de proposer
de meilleurs vaccins, en optimisant l'activité de l'enzyme pour
augmenter l'affinité et les fonctions protectrices des anticorps. Ils
ouvrent également de nouvelles perspectives dans le domaine de la lutte
contre le cancer.