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L'espérance de vie des malades, qui a beaucoup augmenté au cours des dernières décennies, atteint aujourd'hui 46 ans en moyenne. Désormais, la mucoviscidose touche plus d'adultes que d'enfants. Un succès pour ceux qui traitent cette maladie restée pendant longtemps uniquement pédiatrique, en raison du décès prématuré des malades. Aujourd'hui, certaines jeunes femmes correctement traitées ont la chance de pouvoir fonder une famille. D'ailleurs, 24 grossesses ont été déclarées chez de telles patientes en 2006 et 36 en 2008. Franck Dufour, directeur scientifique de l'association Vaincre la mucoviscidose*, explique au Point.fr qu'un tournant est attendu dans les traitements à très court terme.

Le Point.fr : Comment expliquer ce formidable allongement de l'espérance de vie ?

Franck Dufour : Tout d'abord par le dépistage systématique à la naissance, ce qui permet de prendre en charge très rapidement les bébés concernés. C'est ensuite lié au meilleur traitement des symptômes de la maladie, en premier lieu grâce aux antibiotiques destinés à lutter contre les infections respiratoires à répétition. Des études cliniques ont permis d'adapter les médicaments prescrits dans d'autres pathologies à ces malades. Des antibiotiques utilisés en intraveineuse ont été préparés sous forme inhalée, pour qu'il pénètrent dans les poumons. Ils sont ainsi plus efficaces, à moindres doses. Nous nous intéressons également aux traitements dits mucolytiques, qui sont destinés à fluidifier le mucus anormalement épais chez ces patients. C'est vrai dans les poumons et un traitement adapté permet de l'éliminer plus facilement, en complément de la kinésithérapie. Et pour combattre celui présent dans le système digestif, les patients disposent de gélules qui contiennent des extraits pancréatiques.

La greffe de poumon reste-t-elle l'opération de la dernière chance ?

C'est effectivement souvent la dernière solution pour des patients dont les poumons sont très atteints. En 2009, il y avait 148 candidats à la greffe (patients atteints de mucoviscidose) pour 78 transplantations pulmonaires et cardio-pulmonaires réalisées. En 2010, 137 patients atteints de mucoviscidose se trouvaient sur liste d'attente de greffes pulmonaires et cardio-pulmonaires et 83 greffes ont eu lieu. Malheureusement, de nombreux malades attendent longtemps - parfois trop - la transplantation salvatrice. C'est pourquoi nous avons développé un programme majeur dans ce domaine. Nous voulons à la fois mobiliser la société au manque de greffons et trouver les moyens d'"améliorer" l'état de greffons actuellement récusés par les spécialistes pour les rendre utilisables.

Mais votre plus grand espoir concerne la thérapie de la protéine. De quoi s'agit-il ?

Depuis la découverte du gène responsable de la mucoviscidose, en 1989, plus de 1 800 mutations impliquées dans cette maladie ont été identifiées. Une éventuelle thérapie génique est donc très compliquée à mettre en oeuvre. En revanche, on sait que le gène code pour une protéine, qui est malformée ou absente chez les malades. Notre but est d'aller corriger cette protéine ou activer sa production. Dans une des formes de la maladie, qui touche 2 à 4 % des patients en fonction des pays, nous avons mis au point un traitement efficace. Au bout de 48 semaines, il a permis d'augmenter les capacités respiratoires des malades de plus de 10 %, de leur faire prendre en moyenne 3 kilos, de réduire les infections et d'améliorer nettement leur qualité de vie. Ces résultats très impressionnants et la demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) est prévue pour fin 2011 ou début 2012. Nous testons actuellement d'autres molécules capables de corriger ou d'activer la protéine défaillante, notamment dans la mutation la plus fréquente, qui touche plus de 70 % des malades. Comme au rugby, nous espérons maintenant transformer l'essai.

(*) L'association Vaincre la mucoviscidose organise les 27e Virades de l'espoir, dans toute la France dimanche 25 septembre.