17:00 - lundi 3 octobre 2011 - Par Jean-Sébastien Zanchi - Source : Le Figaro

Dans une tribune publiée dans le Figaro, Jean-Philippe Lachaux, directeur de recherche au Centre de recherche en neurosciences de Lyon, explique comment l’usage des smartphones modifie notre cerveau.

Ce spécialiste part du constant que les smartphones « détournent régulièrement notre attention du moment présent pour la plonger dans un monde d'informations abstraites ». Ce comportement serait dû à la stimulation du « circuit de récompense du cerveau » qui « joue un rôle central dans la motivation et le plaisir et dans les phénomènes d'addiction ». C’est par exemple ce système qui nous pousse à boire quand nous avons soif.

Il a ainsi été démontré que certains neurones réagissent de la même manière à la perspective d’obtenir une information importante véhiculée par les e-mails ou les SMS. Il est toutefois trop tôt pour savoir si les smartphones ont « des effets durables sur l'organisation fonctionnelle du cerveau » comme « l'apparition de zones dédiées à leur usage ». Il est en revanche certain qu’ils le mettent dans une « situation permanente de multitâche pour laquelle il n'est pas forcément conçu ».

Pour une éducation à l’usage du smartphone

Chaque situation dans laquelle on se trouve est donc désormais perturbée par l’usage de nos smartphones. Notre cerveau doit donc « apprendre à définir une hiérarchie dans ses priorités, auparavant imposée par le contexte unique dans lequel nous nous trouvions à chaque moment ». En vacances au bord d’une piscine, on peut ainsi penser à son collègue de bureau qui vient de nous envoyer un mail.

« Cet effet de sélection conduit à un appauvrissement de notre expérience sensorielle », explique Jean-Philippe Lachaux. Dans les moments « en creux » de notre journée, notre cerveau n’est alors plus disponible pour les « phases d'écoute et de réceptivité accrue à ce qui nous entoure, ou à ce que nous ressentons ».

Le chercheur ne jette pas pour autant la pierre à la technologie, mais plutôt aux usages que l’on en fait. Il faut être « conscients de la charge qu'ils font peser sur nos capacités attentionnelles ». Et de conclure par une plaidoirie en faveur de l’éducation : « dans cet univers de multitâche permanent, ce bon usage ne va plus de soi et il est peut-être temps d'envisager une véritable éducation de l'attention, notamment en milieu scolaire, qui prépare dès l'enfance à la vie connectée ».