Source: CNRS-INSB

Des chercheurs de l'Institut de génétique moléculaire de Montpellier (IGMM, CNRS/Universités Montpellier 1 et 2) viennent de déchiffrer le mécanisme qui contrôle l'expression différentielle de gènes selon leur origine parentale. Ce travail, publié le 25 novembre 2011 dans The EMBO Journal, permet de comprendre pourquoi certains gènes ne deviennent actifs que sur la copie maternelle et d'autres, que sur la copie paternelle.

Notre patrimoine génétique est constitué de gènes représentés par deux copies: une copie d'origine paternelle et une copie d'origine maternelle. L'expression des gènes est très finement régulée, notamment au cours du développement embryonnaire. Chez les Mammifères par exemple, il existe ce que l'on appelle "l'empreinte génomique". Contrairement aux copies de la plupart des gènes, qui sont actives ou inactives de la même façon, les copies de gènes "soumis à empreinte" ont un devenir différent en fonction de leur origine parentale. L'une des deux copies, celle d'origine paternelle ou celle d'origine maternelle, est active ; l'autre est réprimée.

De multiples maladies humaines sont dues à la perte d'expression d'un gène normalement actif ou à l'activation d'un gène normalement "silencieux". C'est pourquoi il est essentiel de comprendre les mécanismes qui régulent l'empreinte génomique (1).

Le facteur clef qui contrôle l'expression des gènes soumis à empreinte est une modification chimique de l'ADN, la méthylation. Le fait que certains gènes soumis à empreinte acquièrent leur méthylation durant la formation des spermatozoïdes, et d'autres, durant la formation des ovules, restait néanmoins mal compris. Les derniers travaux de l'équipe dirigée par Robert Feil à l'IGMM permettent aujourd'hui d'y voir plus clair.

Grâce à des cellules germinales mâles de Souris, les chercheurs sont parvenus à expliquer pourquoi la méthylation de certains gènes se fait spécifiquement dans les ovules et pas dans les spermatozoïdes. En fait, certaines parties de ces gènes soumis à empreinte sont protégées contre la méthylation. Cette protection est apportée par une autre modification chimique, déjà en place dans les cellules germinales précoces. L'analyse de cette mutation a montré qu'il s'agit d'un mécanisme de régulation connu pour son implication dans l'expression des gènes.

Ainsi, et pour la première fois, l'équipe a pu établir un lien entre l'empreinte génomique spécifiquement paternelle et un mécanisme de régulation lui-même lié à l'expression des gènes. Cette découverte majeure change et élargit notre vision de l'empreinte génomique et de sa régulation développementale. Elle ouvre de nouvelles perspectives dans l'élaboration d'approches innovantes pour contrer les dérégulations de l'empreinte impliquées dans certaines pathologies humaines.

Note: (1) Genomic imprinting and human disease, Ryutaro Hirasawa, Robert Feil, Essays Biochemistry 48(1):187-200, Published on September 20, 2010, doi:10.1042/BSE0480187.
Référence: Transcription and histone methylation changes correlate with imprint acquisition in male germ cells, Amandine Henckel, Karim Chebli, Satya K Kota, Philippe Arnaud, Robert Feil, The EMBO Journal, Published on November 25, 2011, doi:10.1038/emboj.2011.425.