POLLUTION - Les résultats de la première étude sur la qualité de l'air à la campagne montrent que la pollution y reste moins important que dans les villes, à quelques exceptions près...

Respire-t-on vraiment mieux à la campagne qu'à la ville? Des mesures inédites menées dans des villages de neuf régions françaises témoignent d'une qualité de l'air plutôt bonne en zone rurale, sauf dans les fonds des vallées alpines, favorables à l'accumulation de la pollution. De Sarzeau (Morbihan), au bord de l'Atlantique, à Lescheraines (Savoie), dans les Alpes, en passant par la Basse-Normandie, le Poitou-Charentes, le Limousin, l'Auvergne ou la Franche-Comté, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) a ausculté la qualité de l'air loin des villes.

Connaître l’impact du chauffage au bois

Principale bonne nouvelle de cette étude Particul'air dévoilée mardi: les niveaux de polluants mesurés dans neuf communes aux caractéristiques variées «sont inférieurs aux normes européennes sur la qualité de l'air, à l'exception (du site de Lescheraines) situé en fond de vallée alpine». Si les niveaux de particules fines (poussières émises par les véhicules et le chauffage au bois notamment) et d'autres polluants nocifs pour la santé sont bien suivis en ville, ils le sont peu en zones rurales.

Cette campagne inédite menée entre mars 2009 et février 2010 dans des communes de moins de 7.000 habitants, sans industries polluantes ni grands axes de circulation, visait en particulier à évaluer l'impact du chauffage au bois et du brûlage de déchets verts sur la qualité de l'air. Le recours au bois, moins émetteur de gaz à effet de serre que le fioul ou le gaz, a été encouragé dans le cadre de la lutte contre le changement climatique. Et la France est aujourd'hui le premier pays consommateur de bois comme source d'énergie en Europe, selon l'Ademe. L'une des questions est de savoir quel est l'impact de ce mode de chauffage sur la qualité de l'air.

Un village hors des clous, au fond de la vallée

Si «la situation est globalement meilleure que ce qu'on attendait», selon Agnès Hulin, de l'Atmo Poitou-Charentes, association qui a coordonné cette étude, le cas de Lescheraines, en fond de vallée alpine, «fait réfléchir». Le niveau élevé de polluants enregistré dans ce village alpin de seulement 700 âmes s'explique par une configuration de terrain favorable à l'accumulation des polluants émis localement, principalement par les cheminées individuelles mais aussi par la combustion de déchets verts issue de l'activité forestière. Ce village est le seul parmi les neuf examinés qui n'est pas dans les clous par rapport aux valeurs réglementaires pour les particules, constate l'étude.

Plus inquiétant: les concentrations en benzo-a-pyrène, un polluant cancérigène, y excèdent largement les niveaux retenus pour la réglementation, et sont parfois plus importantes que celles mesurées dans des grandes agglomérations, selon l'association de surveillance de Rhône-Alpes. «On a vraiment été surpris par la différence entre les situations en fond de vallées et en plaine. Sachant que Lescheraines n'est pas un cas particulier, on peut s'intéresser à tous ces villages où on brûle du bois en fond de vallée», commente Agnès Hulin.

Pour Joëlle Colosio, chef du service Évaluation de la Qualité de l'Air de l'Ademe, «l'étude ne remet pas en question l'utilisation du bois comme source d'énergie, mais montre qu'il faut l'accompagner de bonnes pratiques». Le passage à un insert fermé et bénéficiant d'un label «Flamme verte 5 étoiles», qui permet de consommer jusqu'à 80% de moins de bois et d'émettre beaucoup moins de particules, est par exemple «bon pour la facture, bon pour la santé et bon pour le climat», souligne cette responsable de l'Ademe.