Des cellules souches peuvent revivre après la mort
Par Benje le dimanche, juin 17 2012, 20:25 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS
Des chercheurs de l'Institut Pasteur, de l'université de Versailles Saint-Quentin-en- Yvelines, de l'AP-HP et du CNRS, dirigés par Fabrice Chrétien (1) en collaboration avec Shahragim Tajbakhsh (2) ont démontré pour la première fois, chez l'homme et chez la souris, la faculté qu'ont des cellules souches de demeurer dans un état de dormance quand leur environnement devient hostile, y compris plusieurs jours après la mort de l'individu. Cette capacité à considérablement réduire leur activité métabolique leur permet de préserver leur potentiel de division cellulaire pour favoriser la réparation et la croissance d'un organe ou d'un tissu quand les conditions du milieu redeviennent favorables. Cette découverte laisse envisager des perspectives thérapeutiques pour de nombreuses maladies. Cette publication est parue dans la revue Nature communications.
Les cellules souches du muscle survivent 17 jours post-mortem chez
l'homme et 16 jours post-mortem chez la souris. Cette découverte a été
réalisée par des chercheurs de l'Institut Pasteur, de l'université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, de l'AP-HP et du CNRS,
dirigés par le Pr Fabrice Chrétien, en collaboration avec l'équipe
dirigée par le Pr Shahragim Tajbakhsh. Les scientifiques ont également
montré que ces cellules souches, une fois remises en culture, conservent leur capacité à se différencier en cellules musculaires parfaitement fonctionnelles.
Devant ce résultat très étonnant, les scientifiques ont cherché à
caractériser ces cellules pour comprendre comment elles pouvaient
subsister dans un milieu aussi défavorable. Ils ont observé la mise en
place, chez ces cellules, d'un mode quiescent, dont le métabolisme est
extrêmement diminué. Cet état de dormance est favorisé par une organisation cellulaire réduite au strict nécessaire: très peu de mitochondries (les usines de production d'énergie -à partir d'oxygène- de toute cellule) et des stocks énergétiques très faibles.
"Un parallèle peut être établi avec les conditions pathologiques où les
cellules doivent faire face à des carences sévères avant d'entrer à
nouveau dans le cycle cellulaire pour régénérer le tissu ou l'organe
endommagé", explique Fabrice Chrétien. "Quand le muscle entre en phase
aigüe de lésion, la distribution d'oxygène est très perturbée. Nous
avons même constaté que les cellules souches musculaires en anoxie
(privées d'oxygène) à 4°C survivaient mieux que celles qui avaient été
exposées régulièrement à l'oxygène ambiant".
L'équipe de Fabrice Chrétien s'est ensuite demandée si ces résultats
pouvaient s'appliquer à un autre type cellulaire. Elle a donc testé les
cellules souches de la moelle osseuse à l'origine des cellules sanguines
chez la souris. Celles-ci restent viables 4 jours post-mortem et
conservent également leur capacité à reconstituer les tissus après
greffe de moelle.
Cette découverte laisse envisager une nouvelle source et surtout de nouveaux moyens de conservation des cellules souches à usage
thérapeutique pour un certains nombres de pathologies. C'est le cas par
exemple de la leucémie qui nécessite une greffe de moelle osseuse pour
restaurer les cellules sanguines et immunitaires des malades détruites
par chimiothérapie ou radiothérapie.
En prélevant après leur mort des cellules souches de moelle osseuse sur
des donneurs consentants, les médecins pourraient pallier la pénurie de
tissus et cellules. Une piste thérapeutique qui nécessite encore de
nombreuses validations avant d'être réellement mise en application, mais
très prometteuse dans le cadre de la thérapie cellulaire.
Notes: (1) Fabrice Chrétien est responsable de l'unité Histopathologie humaine
et modèles animaux à l'Institut Pasteur, neuropathologiste et professeur
d'histologie à l'université Versailles Saint Quentin en Yvelines et
dans le service d'Anatomie pathologique de l'hôpital Raymond Poincaré
(AP-HP) à Garches.
[i](2) Shahragim Tajbakhsh est professeur à l'Institut Pasteur où il
est responsable de l'unité Cellules souches et développement (unité
Institut Pasteur/CNRS)[/i]