Source: Jean Hamann - Université Laval

Diffuser une lumière bleue et rouge pourrait aider à ajuster l'horloge interne des travailleurs de nuit.

Il y aurait moyen de contrer la baisse de vigilance qui frappe les travailleurs de nuit en les exposant à une savante combinaison de lumière bleue et rouge. C'est ce que suggèrent les travaux menés par Charlotte Imane Fontaine et Marc Hébert qui ont été présentés le 31 mai lors de la Journée annuelle de la recherche de la Faculté de médecine de l'Université Laval.

L'horloge biologique humaine avance au pas de la mélatonine, une hormone produite par le cerveau dont la concentration augmente en fin de journée et atteint un pic vers 5 h du matin. La mélatonine ralentit le métabolisme, abaisse la température corporelle, réduit la vigilance et induit le sommeil, des effets contre lesquels doivent lutter les travailleurs de nuit.

Les travaux antérieurs de l'équipe de Marc Hébert ont montré qu'il est possible de retarder la sécrétion de mélatonine en plaçant des lampes projetant une lumière bleu-vert à proximité des travailleurs de nuit. La lumière du jour, en particulier celle du matin, contient beaucoup de bleu et prévient la sécrétion de mélatonine. "La lumière bleue est reconnue pour stimuler la vigilance, rappelle le professeur Hébert. Elle active un photopigment, la mélanopsine, présent dans un sous-groupe de cellules ganglionnaires de la rétine impliquées dans la régulation de l'horloge biologique."

Une fois stimulée, la mélanopsine est dégradée de sorte que la lumière bleue peut devenir moins efficace pour maintenir la vigilance. Pour régénérer la mélanopsine, il faut exposer la rétine à la lumière rouge. Une combinaison de lumière bleue et rouge pourrait-elle constituer le cocktail parfait pour maintenir la vigilance des travailleurs de nuit?

Il semble que oui, suggèrent les expériences menées par les chercheurs Fontaine et Hébert sur 12 sujets qu'ils avaient conviés à leur laboratoire pour y passer 4 nuits blanches. La lumière pulsée combinant le bleu et le rouge est celle qui a induit la plus nette augmentation des indices indirects de vigilance - le rythme cardiaque et la température corporelle - lors des tests.

Selon les chercheurs, l'implantation d'un tel régime d'éclairage en milieu de travail pourrait réduire les accidents liés à un manque de vigilance en plus d'améliorer la qualité de vie des travailleurs de nuit. Une demande visant à breveter cette technologie est en cours. Les travailleurs soumis à un éclairage pulsé bleu et rouge n'auront pas l'impression d'être dans une discothèque pour autant. "La combinaison du bleu et du rouge donne une lumière lilas, souligne le professeur Hébert. Par ailleurs, la pulsation est de 70 flashs à la seconde, elle n'est pas détectable par le cerveau et le travailleur ne la perçoit pas visuellement. Par contre, les cellules de la rétine, elles, semblent en mesure de la détecter."