Source: CNRS-INEE

Une expérience internationale dont une partie a été faite en France et à laquelle a participé un chercheur du Centre d’Écologie Fonctionnelle et Évolutive vient de montrer que les organismes décomposant la matière organique contenue dans le sol la recyclent de la même manière partout, quels que soient la latitude et les facteurs environnementaux. Des résultats qui viennent d'être publiés par Ecology Letters.

Environ 60 milliards de tonnes de carbone sont recyclées par les écosystèmes terrestres chaque année. Issu de la matière organique morte qui se trouve essentiellement sur et dans le sol, ce carbone retourne à l'atmosphère sous forme de CO2. Question centrale pour prévoir la concentration du CO2 atmosphérique et ses conséquences pour le changement climatique, la compréhension du couplage biosphère-atmosphère est difficile car les facteurs contrôlant les flux de carbone sont multiples. Une extrême diversité de micro-organismes et d'invertébrés régissent en effet les processus de recyclage au sein des écosystèmes terrestres. On peut trouver un millier d'espèces d'invertébrés sur un mètre carré de sol d'une hêtraie tempérée et entre 10 000 et 100 000 espèces de bactéries dans un seul gramme de terre. De plus, la composition de ces communautés de décomposeurs varie beaucoup selon le type d'écosystème.

Outre l'effet de facteurs environnementaux contrastés entre forêt tropicale et forêt boréale par exemple, les différences entre communautés de décomposeurs peuvent refléter une adaptation à la qualité physique et chimique de la matière organique. L'étude publiée par Ecology Letters a voulu tester l'hypothèse selon laquelle le recyclage de la matière organique serait assuré par des communautés de décomposeurs spécialisées, spécifiques à chaque type d'écosystème. Les chercheurs ont déposé des microcosmes contenant des débris de feuilles (des litières) dans quatre écosystèmes forestiers des zones subarctique (nord de la Suède), tempérée (Pays-Bas), méditerranéenne (sud de la France) et tropicale (Guyane). Toutes les litières de chaque écosystème étaient exposées sur tous les sites.

De manière étonnante, les résultats montrent que la spécialisation des décomposeurs ne semble pas exister. Quel que soit l'écosystème d'origine de la matière organique, les différentes communautés de décomposeurs la recyclent de la même manière et leur activité est contrôlée par les mêmes paramètres physico-chimiques de la matière organique. Ce résultat inattendu suggère peu de spécificité des communautés de décomposeurs dans des milieux distincts et, par conséquent, la possibilité d'une modélisation relativement simple des flux de carbone entre biosphère et atmosphère, même à des échelles spatiales très vastes.