Le cœur qui bat la chamade, le décor qui s’efface, l’autre qui occupe subitement tout l’espace… On a tous une petite idée de ce que représente le fait de tomber amoureux. Jamais pourtant une étude ne s’était intéressée au lieu où les Français rencontrent celle ou celui qui va marquer leur vie amoureuse : où se laisse-t-on séduire par son tout premier partenaire sexuel et, surtout, où succombe-t-on à celui ou celle avec qui on va se mettre en couple? C’est le thème inédit d’une * présentée hier par l’Ined, l’Institut national d’études démographiques, qui s’est intéressée aux évolutions des lieux de rencontre dans le temps… et montre qu’en soixante ans on est passé du bal du village… aux couloirs du site où l’on fait ses études ou à la cuisine enfumée d’une petite fête entre amis.

A la fac plutôt qu’au travail

S’il fut un temps où un couple sur cinq se formait à l’usine ou au bureau, l’univers professionnel a largement perdu cette vertu! Que ce soit pour découvrir la vie ou se mettre en ménage, les études sont devenues principales pourvoyeuses de love storys. « La jeunesse s’est beaucoup allongée, expliquent les démographes Michel Bozon et Wilfried Rault, coauteurs de l’étude. Les jeunes entrent si tard dans une vie professionnelle stable aujourd’hui qu’ils ont souvent rencontré leur conjoint avant. »

Mieux qu’au bal des années 1960 et à la discothèque des années 1980, les garçons, surtout, dénichent leur première partenaire sexuelle dans le cadre scolaire et, dans une moindre mesure, un peu plus tard, celle qui va devenir leur femme.

Dans les soirées entre amis bien mieux que sur Internet

C’est la surprise de l’enquête… Le mythe moderne « Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants grâce à Meetic » relève davantage de la com que de la réalité. Si favorise peut-être les remariages ou les relations extraconjugales, ce n’est pas là que l’on fait la rencontre décisive. « Même les plus jeunes, qui sont 30% à fréquenter les sites de rencontre, n’y tombent pas sur celui ou celle avec lequel ils vont s’installer », explique Michel Bozon. Pour cette génération-là, le Web n’est même pas le déclencheur de la première aventure sexuelle : seuls 8% des garçons et 6% des filles y arrivent par ce biais. Et ce chiffre tombe à 1% quand il s’agit de rencontrer son premier conjoint : celui-là, on tombe généralement nez à nez avec lui dans la vraie vie, un verre à la main, chez des amis. Les jeunes femmes, surtout, le rencontrent ainsi.

Dans son milieu social avant tout

Mais pour rencontrer son premier grand amour dans une fête entre amis, encore faut-il y être invité… Cela explique pourquoi, pour les classes sociales moins diplômées, les lieux publics (café, , centre commercial, etc.) restent d’importants lieux de rencontre.

« Dans la vraie vie, le prince et la bergère ont peu de chances de se rencontrer, concluent Michel Bozon et Wilfried Rault. Qui se ressemble s’assemble et ce sont les lieux que l’on fréquente qui structurent cette homogamie sociale. »

Un jeune ingénieur a peu de chances de rencontrer sa compagne sous la boule à facettes du Macumba. Alors que 30% des enfants d’agriculteurs tombent encore en pâmoison devant la femme de leur vie en boîte de nuit…

* Enquête « La rencontre du premier partenaire sexuel et du premier conjoint ».