Sous la houlette de l'Agence spatiale européenne, architectes, industriels et scientifiques réfléchissent à la manière de construire sur d'autres planètes.

Envoyer des hommes planter un drapeau sur la Lune est une chose, construire un bâtiment pour y loger des astronautes en est une autre. C'est pourtant le défi que s'est fixé l'Agence spatiale européenne (ESA) en soutenant, dans le cadre de son programme de recherche (GSP), une étude sur la faisabilité d'une base lunaire... par impression 3D. Une technique qui permet de fabriquer un objet entièrement conçu sur ordinateur en superposant des couches d'un matériau (généralement du plastique ou du métal) pour former un volume. L'objectif étant ici d'utiliser au maximum les matériaux présents sur la Lune afin de limiter des coûts d'acheminement prohibitifs.

Pour mener à bien cette mission, l'ESA s'est adjoint les services d'un cabinet d'architecture britannique renommé, Foster & Partners, de la compagnie Monolite D-Shape, pionnière en matière d'impression 3D appliquée à la construction, de la firme Alta Space spécialisée dans la propulsion spatiale et de l'école supérieure italienne des sciences appliquées Sant'Anna de Pise. Résultat : un projet futuriste que l'agence européenne vient de dévoiler tout en précisant que sa faisabilité devait encore être approfondie.

Vue de l'extérieur, la base, prévue pour héberger quatre personnes au pôle sud de la Lune, a l'allure d'un igloo de pierre desservi par une galerie. Pourtant, à l'intérieur, c'est bel et bien une structure gonflable pressurisée reliée à une pièce tubulaire faisant office de sas qui devrait accueillir les voyageurs de l'espace. Relativement légère, celle-ci serait acheminée depuis la Terre avec des imprimantes 3D. Ces robots, dont la tête d'impression peut se déplacer sur un rayon de six mètres, seraient alors chargés de recouvrir la fragile bulle d'un dôme de pierre constitué de sable lunaire (régolite), aggloméré par adjonction d'oxyde de magnésium et de sel.

Une toiture solide est en effet indispensable afin de protéger les astronautes des radiations, des variations brutales de température ainsi que des chutes de petites météorites extrêmement fréquentes sur la Lune en l'absence d'atmosphère. Aussi les concepteurs du projet se sont-ils inspirés des os creux des oiseaux, à la fois légers et résistants, pour concevoir des murs à la structure alvéolaire.

Selon les premiers tests réalisés sur Terre, les appareils seraient actuellement à même de construire deux mètres de mur à l'heure, de sorte que les spécialistes envisagent l'édification d'une telle base en seulement une à deux semaines. Reste cependant quelques inconnues. Comment les machines vont-elles supporter les écarts de température très importants à la surface de la Lune ? Les poussières très fines qui jonchent sa surface ne risquent-elles pas de gripper cette belle mécanique ? De nouveaux tests d'impression, avec une pierre volcanique italienne à 99,8 % similaire au régolite, devront donc encore être organisés, dans des conditions simulant au mieux une mission lunaire. Un préalable avant que nous puissions espérer voir fleurir la moindre habitation à la surface du satellite de la Terre, voire sur Mars ou d'autres planètes du système solaire.