Le nouvel accord commercial en préparation entre l'Union européenne et les États-Unis va-t-il s'avérer être un cheval de Troie contenant des dispositions contenues dans le traité ACTA, pourtant enterré cet été par les eurodéputés ? C'est ce que craint aujourd'hui La Quadrature du Net, qui déplore au passage l'opacité entourant les négociations actuelles.

La ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq a lancé la semaine dernière une consultation publique dans la perspective d’un « accord de libre-échange complet et approfondi entre l’Union européenne et les États-Unis ». Comme l’expliquait Le Monde il y a quelques jours, cet accord aurait effectivement un champ extrêmement large : tarifs douaniers sur les produits, services, propriété intellectuelle, accès aux marchés publics...

 Sauf que La Quadrature du Net voit d’un très mauvais œil les discussions relatives à ce nouvel accord commercial. Et pour cause : quelques jours seulement après que le Parlement européen a repoussé à une très large majorité le traité ACTA, l’on apprenait que la Commission européenne envisageait de se servir d’un accord en discussion avec le Canada (le CETA, Canada Eu Trade Agreement) comme d’un cheval de Troie afin de mettre en œuvre certaines dispositions d’ACTA. Début juillet, le juriste canadien Michael Geist relevait en effet un clonage quasi parfait de nombreux passages du traité anti-contrefaçon : mesures techniques de protection, responsabilité et rôle des intermédiaires techniques, dispositions pénales, dispositions civiles... Alors que la polémique enflait, Bruxelles tentait de calmer le jeu, assurant que certains des articles de CETA, identiques à ceux du traité anti-contrefaçon, avaient été retirés. Cependant, il fallait s’en remettre à la bonne parole de la Commission, dans la mesure où les négociations (secrètes) avec le Canada ne permettent pas d’avoir accès au texte - qui est d’ailleurs toujours en cours de discussion.

L’association de défense des libertés numériques craint par conséquent que des dispositions d’ACTA se retrouvent insérées dans ce nouveau traité commercial concernant cette fois l’UE et les États-Unis. Elle déplore également que tout ceci soit une nouvelle fois discuté dans le plus grand secret. « L'introduction de mesures portant atteinte aux libertés fondamentales et à un Internet libre dans des accords commerciaux est inacceptable et ne sera jamais légitime » tonne aujourd’hui Jérémie Zimmermann, porte-parole de LQDN. Il en appelle ainsi les citoyens à « s'opposer à cette tendance anti-démocratique en alertant l'opinion publique et leurs représentants ».

 Comme l’indique le ministère du Commerce extérieur, un groupe de travail entre l’Union européenne et les États-Unis devait rendre « fin janvier ou début février 2013 » un rapport final, en vue d’appuyer d’éventuelles impulsions de la part des chefs d’État européens et américain. Il est en outre précisé qu’un mandat de négociation « pourrait être adopté dans le courant de l’année 2013 ».