Un dispositif implantable développé au Royaume-Uni vise à aider les personnes obèses à ressentir la satiété.

Cette nouvelle technologie pourrait bien changer la vie des personnes obèses. Deux chercheurs de l'Imperial College de Londres planchent sur un nouveau dispositif appelé i2MOVE qui serait capable d'analyser les messages émis par l'estomac au cours de la journée et de les convertir en signaux électriques pour renforcer la sensation de satiété au niveau du cerveau. L'un de ces chercheurs, le Pr Chris Taumazou, est expert de ces nouvelles technologies puisqu'il a développé le premier implant cochléaire pour restaurer l'audition ou encore un pancréas artificiel pour les diabétiques de type 1. C'est peut-être ce qui a incité l'European Research Council à investir sept millions d'euros dans ce projet.

Réguler l'appétit

Si les chercheurs se veulent très discrets sur la nature même du dispositif, ils expliquent qu'il s'agit d'un implant «intelligent» qui peut enregistrer et analyser les signaux chimiques et électriques provenant de l'estomac au niveau du nerf vague. Ce dernier fait le lien entre système digestif et le cerveau. Il contrôle de façon inconsciente la libération d'hormones digestives, les contractions de la paroi intestinale ou encore l'état de satiété.

«L'objectif est de fixer sur le nerf des électrodes reliées à une puce pour enregistrer les signaux émis. Cela se fera au niveau de l'abdomen par coelioscopie, une méthode chirurgicale peu invasive. Quand le patient se nourrira, le dispositif reconnaîtra des signaux spécifiques et provoquera une stimulation le long du nerf vague pour renforcer la sensation de satiété et limiter la prise alimentaire», expliquent les chercheurs.

L'idée de stimuler le nerf vague pour réguler l'appétit n'est pas nouvelle. Une société américaine développe par exemple un pacemaker de la satiété appelé VBLOC. Deux électrodes fixées sur ce même nerf émettent régulièrement des impulsions pour limiter l'envie de manger. Les premiers résultats montrent qu'à peine la moitié des patients perdent au moins 20% de leur surpoids grâce au dispositif. Un résultat jugé néanmoins décevant car les objectif de traitement de l'obésité sont très élevés. «Il faut que le patient perde la moitié de son surpoids dans les deux ans, un but que l'on atteint dans 80 à 85% des cas avec la chirurgie», explique le Dr Salomon Benchetrit, spécialiste en chirurgie de l'obésité à Lyon.

Plusieurs obstacles à contourner

Mais ce nouveau dispositif permettrait d'améliorer le concept puisqu'il renforce simplement des sensations naturelles. «Il ne s'agit plus de «tromper» le cerveau en créant artificiellement un sentiment de satiété permanente mais il bien de détecter cette satiété puis de l'amplifier au niveau du cerveau», précisent les chercheurs. Ils vont lancer les premiers essais chez l'animal. Tout le challenge repose sur la capacité du dispositif à déchiffrer les signaux envoyés par l'estomac afin d'identifier ceux relatifs à la satiété. Très optimistes sur l'issue de cette première étape, ils entendent débuter des essais chez l'homme d'ici trois à cinq ans. À terme, cette technique permettrait de proposer une alternative à la chirurgie qui est très invasive, irréversible et qui entraîne une modification des comportements alimentaires.

Pour le Dr Salomon Benchetrit, ce concept est intéressant dans la mesure où «les patients obèses veulent retrouver un état de satiété et demandent une solution pour cela». Néanmoins, la technique risque de se heurter à deux obstacles majeurs. D'une part, la stimulation régulière d'un nerf finit par le désensibiliser et d'autre part, la digestion entraîne des contractions fortes qui risquent de déplacer les électrodes. Enfin, tout comme la chirurgie, cette technique ne permet pas de s'attaquer à la composante compulsive de la maladie et qui est le plus souvent à l'origine de la prise de poids. «L'obésité est avant tout d'un problème comportemental», rappelle-t-il.