Selon Jean-Michel Oughourlian, chercheur et écrivain, les cerveaux rationnel et émotionnel dépendent de Notre "troisième cerveau", mimétique.

"Je prédis que les neurones miroirs feront pour la psychologie ce que l'ADN a fait pour la biologie", déclarait en 2000 V. S. Ramachandran, chercheur en neurosciences et éminent professeur à l'université de Californie à San Diego. Quelques années auparavant, des chercheurs italiens avaient par hasard découvert ce nouveau type de cellules, en observant que les mêmes zones étaient activées dans le cerveau de celui qui fait une action et dans le cerveau de celui qui l'observe. Une altérité constitutive de nos comportements, et ce dès la naissance : les enfants apprennent par imitation mais n'ont pas besoin d'apprendre à imiter. La théorie du désir mimétique, créée par le philosophe René Girard et exposée dans Mensonge romantique et vérité romanesque, serait-elle "scientifiquement prouvée" par l'existence des neurones miroirs ? C'est en tout cas le point de départ Jean-Michel Oughourlian, chercheur en neurosciences et professeur de psychopathologie à la Sorbonne.  

"L'inconscient, c'est les autres"

Dans Notre troisième cerveau, il en fait le principe fondateur d'une nouvelle psychologie et d'une nouvelle psychiatrie. Le cerveau rationnel et le cerveau émotionnel seraient régis par un troisième cerveau, dit "mimétique", qui fonctionne comme le moteur de tous les échanges neurologiques. Oughourlian chausse ensuite ses "lunettes mimétiques" et voit, partout, les signes de l'emprise de l'Autre : dans les récits des amours de ses patients, dans Candide de Voltaire ou dans le fameux tweet de Valérie Trierweiler. Moyen pour lui de se démarquer de la psychologie freudienne - "l'inconscient, c'est l'autre, l'Autre, les autres" - mais aussi de repenser les "maladies du désir" : donjuanisme, anorexie, toxicomanie, sadomasochisme, relevant du cerveau mimétique. 

Avec cette dialectique des trois cerveaux, Jean-Michel Oughourlian propose plusieurs pistes pour comprendre les mécanismes mimétiques, sans oublier que, "pour nous adresser au troisième cerveau, nous ne disposons que de nous-même". L'ouvrage scientifique devient alors un manuel de désir pratique qui dévoile les mille et une manières dont l'altérité structure nos comportements. Seul un processus individuel, long et difficile, de reconnaissance de cette altérité conduira selon Oughourlian à l'apaisement et à la sagesse, résumées il y a longtemps déjà par saint Augustin : "Le bonheur, c'est de continuer à désirer ce que l'on possède déjà."