Selon les premiers résultats d'une étude britannique, les effets d'une beuverie dureraient bien plus longtemps qu'on ne pense dans l'organisme. Le cerveau et les capacités intellectuelles en particulier, seraient toujours perturbés même après que l'individu soit redevenu sobre.

Quiconque a déjà expérimenté la "gueule de bois" vous dira que les lendemains de beuverie sont loin d'être toujours agréables. Nausées, maux de tête, vertiges,... L'excès d'alcool laisse derrière lui plusieurs symptômes qui témoignent des effets qu'à la boisson sur notre organisme. Et ses effets se prolongent bien après que l'alcoolémie soit retombée à zéro, en particulier au niveau du cerveau et de nos capacités intellectuelles.

C'est ce qu'affirme une étude préliminaire réalisée par des chercheurs de l'université de Keele au Royaume-Uni. Selon ces travaux toujours en cours, une nuit de beuverie excessive diminuerait les capacités du cerveau à fonctionner même après être redevenu sobre. "La plupart des personnes sont familières avec les effets indésirables de la gueule de bois qui peuvent apparaitre le lendemain d'un excès d'alcool", a expliqué le Dr Lauren Owen, qui dirige la recherche.

Mais, "les symptômes de la gueule de bois ne sont pas juste psychologiques, ils affectent le fonctionnement cognitif et l'humeur également, ce qui peut conduire à de nombreuses conséquences indésirables au quotidien", a t-elle ajouté cité par le Telegraph. Or, "bien que plusieurs papiers scientifiques traitent des effets aigus de la consommation d'alcool, les chercheurs ont largement négligé la question de la 'gueule de bois'".

Une "mémoire de travail" perturbée

C'est pourquoi le Dr Owen et ses collègues veulent étudier l'impact de cette manifestation sur le cerveau. Pour cela, ils ont commencé à mesurer chez des individus diverses fonctions cognitives grâce à une batterie de tests neuropsychologiques révélant les fonctions cérébrales affectées. Les résultats préliminaires ont ainsi permis d'observer que les "tâches associées à ce que les psychologues appellent "la mémoire de travail" semblait être les plus affectées", a indiqué le Dr Owen.

La mémoire de travail est ce qui gouverne notre capacité à retenir des informations et à les manipuler. C'est elle qui nous permet par exemple de réaliser deux actions en même temps, de nous souvenir momentanément d'un numéro, de nous rendre vers un point précis ou encore de ne pas être trop distrait par tous les stimuli qui nous parviennent. Elle joue également un rôle dans la réalisation de tâches plus complexes comme le calcul mental par exemple.

Ainsi, les premiers résultats ont montré que les sujets expérimentant une "gueule de bois" présentaient une chute de 5 à 10% des performances de la mémoire de travail et une augmentation de 30% des erreurs réalisés par les participants. Le temps de réaction a également semblé être affecté : les individus âgés d'une vingtaine d'années ayant bu avaient un temps de réaction équivalent à ceux de personnes âgées d'une quarantaine d'années.

L'origine mystérieuse de la "gueule de bois"

"Jusqu'ici, nous avons constaté des différences statistiquement significatives pour ces tâches comparé à un état "sans alcool". Cependant, l'ampleur de cet effet ne sera pas évident tant que nous n'aurons pas toutes les données", a précisé le Dr Owen qui devrait présenter les premiers résultats cette semaine lors d'une conférence à l'université de Keele. Ceci permettra peut-être également de mieux connaitre l'origine de la fameuse "gueule de bois".

En effet, les causes scientifiques de cette manifestation restent relativement floues. Certains pensent qu'il s'agirait en partie d'un symptôme de déshydratation, mais les substances chimiques contenues dans l'alcool joueraient également un rôle. La principal forme d'alcool contenue dans les boissons est l'éthanol. Une molécule qui, dans le foie, est dégradée grâce à des enzymes sous forme d'acide acétique afin d'être expulsé.

Cependant, avant de devenir de l'acide acétique, l'éthanol est converti en éthanal (ou acétaldéhyde), un composé qui est, lui, toxique. Il pourrait ainsi être responsable de certains symptômes de la "gueule de bois". En outre, certaines boissons alcoolisées contiennent aussi du méthanol, une molécule qui, dégradée, forme davantage de composé toxique. Ceci pourrait alors expliquer pourquoi certains alcools sont plus susceptibles de conduire à des lendemains difficiles. Mais toutes ces possibilités restent encore à confirmer.