Des scientifiques de l'université de Dartmouth ont réalisé des IRM sur des cerveaux de volontaires durant un exercice mental. Ils ont ainsi réussi à créer une carte cérébrale des régions impliquées lorsque ces sujets étaient en plein processus imaginatif visuel.

C'est une question qui taraude scientifiques et philosophes depuis des siècles : qu'est-ce qui rend le cerveau humain différent de celui des animaux ? Comment expliquer le mécanisme de l'imagination ? Et comment expliquer que l'homme puisse créer des œuvres d'art, inventer des outils ou des théories scientifiques ? Selon des chercheurs de l'université de Dartmouth, la réponse se trouverait dans "l'espace de travail" du cerveau, un réseau de plusieurs régions connectées entre elles.

Quand on demanda à Albert Einstein de décrire comment fonctionnait sa pensée scientifique, il répondit : "certains signes et des images plus ou moins claires qui peuvent être volontairement reproduits ou combinés". On pourrait ainsi appliquer cette description au principe de l'imagination : utiliser des concepts connus, et les retravailler pour en faire quelque chose de nouveau. Partis de là, les scientifiques ont mené une nouvelle étude pour percer les secrets de l'imagination. 

Des analyses IRM

Au cours de ces travaux publiés dans la revue PNAS, les chercheurs ont mené des examens IRM sur les cerveaux de 16 patients. Pendant ce temps, ils ont demandé aux volontaires d'effectuer des exercices mentaux, consistants à analyser des images et à les recomposer mentalement, soit en les déstructurant, soit pour en assembler de nouvelles. L'IRM a ainsi permis de cartographier quelles zones du cerveau étaient activées par cet exercice.

"Nos résultats nous rapprochent de la compréhension de l'organisation de notre cerveau, et comment il nous sépare des autres espèces, et nous fournit un terrain intellectuel aussi riche pour pouvoir penser librement et de façon créative" explique dans un communiqué Alex Shlegel, auteur de l'étude. "Comprendre ces différences nous donnera des indices sur l'origine de la créativité humaine et peut-être nous permettra de récréer ces schémas chez les machines".

Un réseau de régions connectées

La théorie de "l'espace de travail mental" n'est pas nouvelle en neurosciences, mais elle est très difficile à prouver. L'équipe s'est donc intéressée au penchant visuel de l'imagination, qui requiert la création d'une image totalement nouvelle, et donc une activité cérébrale puissante. Leurs résultats ont permis de mettre en évidence plus de 11 régions impliquées dans ce processus. Parmi ces régions, figurent notamment le lobe occipital et le précuneus. Le lobe occipital héberge la plus grande partie du cortex visuel et permet le traitement de l'information qui arrive par nos yeux. Mais en plus de cette fonction, celui-ci joue également un rôle dans la création d'images mentales, expliquent les chercheurs. Le précuneus est lui, une région qui sert entre autres à la représentation spatiale de l'environnement, et par exemple à "calculer" à l'avance nos mouvements. C'est une des régions les plus connectées de notre cerveau. Des études ont d'ailleurs démontré que le précuneus était plus gros chez l'humain que chez n'importe quel autre animal. Or, les IRM ont démontré que cette zone était également très impliquée lors des exercices mentaux. Cette découverte constitue ainsi une nouvelle avancée vers la compréhension du processus complexe et unique qu'est l'imagination. Mais il faudra encore poursuivre les recherches avant de pouvoir préciser le rôle joué par chacune de ces structures.