Par Janlou Chaput, Futura-Sciences -

Lors des tremblements de terre, le sol en certains endroits devient parfois une soupe et se liquéfie. Le processus est depuis longtemps observé et étudié. Mais une nouvelle étude suggère que les connaissances acquises jusque-là sont incomplètes.

Le paysage après un séisme change parfois d’apparence. La terre se déchire et donne naissance à des failles et autres crevasses, mais des phénomènes plus étranges apparaissent également dans certaines de ses occasions : le sol se liquéfie. Ainsi, une route carrossable se transforme en sables mouvants et piège les véhicules qui y passent, par exemple. Un processus déjà maintes fois observé mais pourtant mal compris, malgré les dégâts qu’il peut causer. Lorsqu’un tel phénomène se déroule juste sous un immeuble, il risque de s’affaisser et de s’effondrer.

Les scientifiques cherchent à comprendre et prédire les zones les plus susceptibles de devenir de la bouillie en cas de séisme. Une nécessité pour éviter de construire des barrages ou des tuyaux de gaz au milieu de territoires fragiles. Des modèles expérimentaux ont été conçus afin de reproduire en laboratoire les tenants et les aboutissants d’une telle liquéfaction.

Amy Rechenmacher, géologue à l’université de Californie du Sud (USC), à Los Angeles, les pense incorrects, car trop éloignés de la réalité. Les suppositions théoriques suggèrent que les terrains sédimentaires gorgés d’eau sont constitués de grains agglomérés les uns contre les autres, formant une ossature solide, et qu’en cas de tremblement de terre, toute la structure se désolidarise. L’énergie dégagée comprime les grains, et des poches se forment où viennent s’agglomérer les molécules d’eau qui, sous la pression, forcent sur les sédiments. Ceux-ci s’écartent les uns des autres et, avec les vibrations de la terre, deviennent plus mobiles que jamais : le sol s’affaisse et l’eau remonte à la surface.

Modèle de liquéfaction du sol à revoir


Là où le bât blesse la géologue californienne, c’est que les modèles expérimentaux utilisés considèrent qu’il n’y a qu’un mouvement négligeable de l’eau durant les secousses, car la pression s’accumule dix fois plus rapidement dans les poches de liquide que l’eau ne peut s’écouler pour la soulager. Ainsi, les tests expérimentaux sont effectués sur des supports granuleux gorgés d’eau entourés d’un revêtement étanche. Une erreur selon Amy Rechenmacher et ses collègues, qui ont conçu leur propre terrain de jeu, plus proche de la réalité selon eux.

Décrit dans la revue Proceedings of the Royal Society A, il apporte de nouveaux éléments d’information sur les processus de liquéfaction du sol. Il démontre que lorsque la pression de l’eau augmente dans le sable, le liquide peut se vidanger aussi vite que la pression ne s’accumule. Ce mouvement génère une onde de pression qui se diffuse à travers le sédiment, à l’origine d’une liquéfaction du sol plus loin, même dans des zones inattendues. Ce processus serait donc la résultante du réarrangement des grains, de la mobilité des fluides et de changements de perméabilité.

Forts de cette mise en évidence, les scientifiques espèrent pouvoir obtenir des données encore plus précises pour mieux prévenir les incidents de ce type lors des tremblements de terre à venir, pour éviter des dégradations trop importantes et approfondir les connaissances sur ce vaste domaine encore mal compris.