Contrairement aux idées reçues, les produits issus de l'agriculture conventionnelle ne seraient pas dangereux pour votre progéniture.

Quand mon fils était bébé, «biologique» était synonyme de «comestible». Si les pommes du supermarché n'avaient pas leur petit logo, je ne les achetais pas. Je savais que les fruits et légumes conventionnels pouvaient contenir des traces de pesticides, et que les pesticides pouvaient affecter son développement cérébral. Certes, les détails de cette association étaient assez flous –je ne savais pas combien de pesticides mon fils était susceptible d'ingérer en avalant des fraises premier prix, ni à partir de quelle quantité cela pouvait lui être nocif. Mais, en un sens, cela n'avait aucune importance: raquer un peu plus pour minimiser les risques, quels qu'ils aient pu être, en valait la peine.

Deux ans plus tard: mon fils gobe des fraises on ne peut plus basiques au petit-déjeuner. Je soutiens les principes de l'agriculture biologique, c'est certain, mais c'est parfois compliqué de débourser plus de 5 euros pour une barquette qu'il aura terminée en moins de deux jours. Par ailleurs, je ne peux m'empêcher de me demander si les aliments biologiques font vraiment une différence sur sa santé, vu qu'il est connu pour lécher la semelle de ses chaussures, embrasser la truffe de mon chien qui vient de remuer ses crottes avec ou manger des biscuits apéritifs –ceux d'un camarade– à même le sol de la crèche. 

Pour ne pas rester dans le flou, j'ai donc décidé de fouiller la littérature scientifique et de m'adresser à des toxicologues, horticulteurs, spécialistes des risques et autres nutritionnistes pour savoir si les produits chimiques présents dans les aliments issus de l'agriculture conventionnelle posaient réellement un risque pour mon enfant.

Ce que j'ai découvert m'a totalement surprise –et, en résumé, je serai un tantinet plus détendue quand il s'agira de nourrir bébé n°2.  

Je voudrais tout de suite préciser que cette chronique ne concerne pas l'intérêt environnemental de l'agriculture biologique (qui demeure, à mon avis, patent), ni même la question de savoir si, en tant que société, nous devrions nous préoccuper des substances chimiques que peuvent receler nos produits alimentaires et ménagers (toujours à mon avis, la réponse est oui).

Biologique = moins de pesticides

Le sujet de cette chronique, c'est de savoir s'il est pertinent d'acheter des aliments biologiques pour vos enfants spécifiquement parce que vous pensez que les pesticides des fruits et légumes conventionnels sont susceptibles de leur être nocifs. Si l'importance de nourrir vos enfants avec de la viande, des œufs et des produits laitiers biologiques vous intéresse, vous devrez attendre, car je m'en chargerai dans un autre article.

Je ne vais pas non plus consacrer beaucoup de signes au débat sur les éventuelles meilleures concentrations en nutriments bénéfiques des fruits et légumes biologiques, comparés aux conventionnels. Dans Slate, James McWilliams a déjà fait un très bon boulot quant aux tenants et aux aboutissants d'une telle problématique: ce que nous disent les recherches, c'est qu'il semble plutôt certain que les végétaux biologiques ne relèvent pas d'un avantage nutritionnel majeur face aux conventionnels, à part qu'ils contiennent moins de nitrates et davantage de vitamine C, sans pour autant que cela se traduise en effets bénéfiques concrets sur la santé. De même, il est difficile de comparer, en général, les nutriments des aliments biologiques et des conventionnels, vu que la géographie et des méthodes agricoles spécifiques peuvent influer considérablement sur la production de ces aliments.

Concentrons-nous donc sur un autre argument en faveur de la nourriture biologique –à savoir qu'elle serait meilleure pour la santé, en particulier des enfants, parce qu'elle contiendrait moins de pesticides.

Tout d'abord, rappelons que biologique ne veut pas dire sans pesticide. Comme l'a déjà fait remarquer la scientifique et journaliste Christie Wilcox, sur son blog tout à fait éclairant du Scientific American, l'agriculture biologique a tout à fait le droit d'utiliser des pesticides et elle ne s'en prive pas. La différence, c'est que l'agriculture conventionnelle peut utiliser des pesticides synthétiques tandis que la biologique se limite (globalement) à des pesticides «naturels», choisis principalement parce qu'ils se décomposent facilement dans l'environnement et qu'ils sont moins susceptibles de polluer le sol et l'eau. Je dis «globalement» car plusieurs produits chimiques synthétiques sont autorisés, aussi, dans l'agriculture biologique.

L'hypothèse, bien évidemment, c'est que ces pesticides naturels seraient plus sûrs que les synthétiques. Ce qui est vrai pour nombre d'entre eux, mais il existe quelques exceptions notables. La roténone, un pesticide autorisé dans l'agriculture biologique (aux Etats-Unis, NDLE[1]), est, au poids, bien plus toxique que plusieurs pesticides synthétiques. Pour tous les produits chimiques, l'agence américaine de protection de l'environnement (EPA) fixe des valeurs limites d'exposition et détermine les quantités auxquelles les individus (y compris les enfants) peuvent être exposés quotidiennement sans effet nocif. Pour la roténone, l'EPA a fixé la barre d'exposition quotidienne à 0,004 mg par kilo de poids corporel.

Comparons donc ces chiffres avec ceux de pesticides synthétiques communément utilisés, à l'instar du malathion, un pesticide organophosphoré. Pour l'association Pesticide Action Network, les organophoshorés sont «parmi les insecticides les plus courants et les plus toxiques utilisés aujourd'hui» –le sarin, le gaz neurotoxique utilisé dans deux attentats terroristes au Japon, dans les années 1990, en est un puissant.

Pour autant, au vu de tests effectués sur des animaux, l'EPA estime que les humains peuvent être exposés sans danger au malathion jusqu'à 0,02 mg par jour et par kilo de poids corporel. Soit une quantité cinq fois supérieure à celle recommandée pour le roténone.

Pour le dire autrement, au poids, le pesticide naturel qu'est la roténone est considéré comme cinq fois plus dangereux qu'un synthétique, le malathion.

Faut-il en utiliser beaucoup?

Pour le glyphosate, un autre pesticide synthétique très courant –vous le connaissez certainement sous son nom commercial, le Roundup– l'EPA recommande une valeur d'exposition limite quotidienne à 0,1 mg de poids corporel, ce qui signifie qu'il est 25 fois moins toxique, au poids, que la roténone.

Le pesticide synthétique captane est, quant à lui, 32,5 fois moins toxique que la roténone et le pyriméthanil l'est 42,5 fois moins. La roténone n'est pas le seul pesticide naturel à surpasser les synthétiques en termes de toxicité. Les pyréthrines, un ensemble de pesticides dérivés des chrysanthèmes et dont l'usage est autorisé dans l'agriculture biologique, sont eux aussi plus toxiques au poids que le Roundup, le captane et le pyriméthanil.

Mais la comparaison entre ces différentes toxicités ne vaut que si les gens sont exposés à des quantités similaires de pesticides synthétiques et naturels. Les cultivateurs biologiques n'utilisent souvent des pesticides qu'en dernier recours –ce qui fait, qu'en théorie, l'exposition aux pesticides naturels devrait être faible.

D'ailleurs, c'est aussi le cas dans l'agriculture conventionnelle, vu que la pulvérisation est un procédé onéreux. Le problème, c'est que les agriculteurs «doivent souvent utiliser de grandes quantités de pesticides naturels, car ils se décomposent plus rapidement», explique Linda Chalker-Scott, professeur d'horticulture et d'architecture paysagère à l'université d’Etat de Washington. «L'un des avantages de certains pesticides synthétiques, c'est qu'ils ont été conçus pour être plus efficaces à des doses moins élevées.»

De fait, dans un rapport de 1989, des chercheurs de l'université McGill avaient fait pousser des pommes en utilisant soit un mélange de pesticides naturels autorisés dans l'agriculture biologique, dont un cocktail de roténone et de pyréthrines, soit un pesticide synthétique, l'Imidan.

Ils avaient trouvé qu'en utilisant les pesticides naturels, ils pouvaient atteindre un rendement de 75% en pulvérisant leurs pommes entre 6 à 7 fois pendant leur période de croissance; avec le pesticide synthétique, ils avaient obtenu un rendement de 90% avec seulement 4 pulvérisations.

Selon une autre étude, plus récente, comparant l'efficacité de deux pesticides naturels et de deux pesticides synthétiques, les biologiques sont bien moins efficaces contre les aphides (pucerons) que les synthétiques. Vu que les agriculteurs biologiques ont sans doute à pulvériser plus fréquemment des pesticides sur leurs cultures, il n'est pas absurde de penser que les fruits et légumes biologiques pourraient en contenir autant, sinon davantage –des pesticides certes naturels, mais cela ne veut pas dire intrinsèquement sans danger– par rapport aux végétaux conventionnels. 

Ah, mais quid de toutes ces études qui laissent entendre que les fruits et légumes biologiques contiennent moins de résidus de pesticides que ceux cultivés de manière conventionnelle?

Les pesticides sont-ils dangereux pour les enfants?

Ces études ne testent que les pesticides synthétiques. Dans les rares études qui se penchent aussi sur les pesticides naturels –à l'instar du Pesticide Data Program de l'USDA, datant de 2009 et portant sur les salades biologiques, des tests effectués en 2010 par le département californien chargé de la régulation des pesticides sur quelques fruits et légumes biologiques, et de ceux, la même année, conduits par l'USDA sur d'autres– les scientifiques trouvent qu'entre 15% et 43% des échantillons de végétaux biologiques contiennent des traces mesurables de pesticides naturels, synthétiques, voire des deux.

Néanmoins, à ma connaissance, personne n'a encore publié une comparaison entre les quantités totales de pesticides présentes dans des fruits et légumes biologiques et des conventionnels, ce qui fait qu'il est difficile d'en conclure autre chose que, oui, les végétaux biologiques peuvent, aussi, être pollués par des pesticides.

Ce qui nous amène à la question: ces pesticides sont-ils dangereux pour vos enfants?

Comme vous le dira n'importe quel toxicologue, c'est la dose qui fait le poison. En d'autres termes, ce n'est pas parce que les fruits et légumes conventionnels et biologiques sont parfois bourrés de pesticides qu'ils sont automatiquement dangereux pour quiconque. Et une analyse des chiffres laisse de fait entendre qu'ils ne le sont pas.

En 2011, dans une étude publiée par le Journal of Toxicology, Carl Winter, spécialiste des pesticides et de la gestion des risques au sein de l'université de Californie-Davis, et son collègue, Josh Katz, ont regardé de plus près la liste «noire» dressée l'Environmental Working Group –une liste de 12 végétaux, cultivés de manière conventionnelle et vendus aux Etats-Unis, que l'association considère comme étant les plus contaminés –cette année, les premières places sont occupées par les pommes, les fraises et le raisin. A l'origine, Winter avait peur que la méthodologie choisie par l'EWG soit biaisée: entre autres choses, l'association n'avait pas comparé les concentrations effectives de pesticides des fruits et légumes testés aux valeurs d'exposition limites dressées par l'EPA pour estimer les effets sanitaires réels de leur consommation.

Pour avoir une idée de la dangerosité des pesticides contenus dans la liste noire de l'EWG, Winter et ses collègues se sont penchés sur des données de l'USDA afin de déterminer, quant aux 10 pesticides les plus courants, les concentrations moyennes présentes sur les 12 fruits et légumes répertoriés. Ils se sont ensuite servi d'autres données fournies par l'USDA sur la consommation des Américains pour estimer les concentrations moyennes et quotidiennes de pesticides ingérées pour chacun de ces 12 fruits et légumes mentionnés. Enfin, pour chaque pesticide, les chercheurs ont comparé les taux d'exposition moyens aux valeurs limites de l'EPA.

Qu'ont-ils trouvé? Commençons d'abord par les pommes, considérées par l'EWG comme le végétal le plus bourré en pesticide du marché, et voyons que le thiabendazole est le pesticide que l'on retrouve le plus couramment sur ce fruit. Winter et ses collègues ont trouvé que, chaque jour, par rapport aux pommes et produits dérivés que les Américains consomment en moyenne, la dose de thiabendazole est 787 fois inférieure aux valeurs d'exposition limites recommandées par l'EPA. Pour le dire autrement, vous devriez manger, quotidiennement, ce que mangent 787 Américains pour ingérer une concentration de pesticides approchant les limites fixées par l'EPA.

Avez-vous rincé vos fruits et légumes?

Quant aux autres fruits et légumes, si on en croit les conclusions et Winter et al, les raisons de s'inquiéter sont encore plus dérisoires. Concernant le captane, le pesticide synthétique qu'on retrouve le plus fréquemment sur les fraises conventionnelles, les Américains sont exposés à des doses 8.180 fois inférieures aux doses limites de l'EPA. Globalement, l'étude estime que les limites de l'EPA sont plus de 1.000 fois supérieures à ce que peuvent représenter 90% des fruits et légumes analysés.

Le fait est que nous sommes exposés aux pesticides par d'autres voies et que certains pesticides peuvent avoir des effets cumulatifs –mais, même dans ce cas, estime Winter, les Américains ne risquent d'ingérer absolument rien qui s'approche des limites dressées par l'EPA, et ce pour tous les pesticides utilisés dans l'agriculture américaine. Et s'il vous arrivait d'ingérer un pesticide à des concentrations équivalentes ou supérieures aux limites de l'EPA, vous ne tomberiez pas pour autant raide mort. Ces limites sont au moins 100 fois inférieures à la dose la plus basse susceptible de causer un quelconque dommage, minimal, aux animaux qui, en laboratoire, ont ingéré cette dose tous les jours pendant quasiment toute leur vie.

«Nous avons à notre disposition d'énormes quantités de données qui nous montrent que nous sommes exposés, dans notre alimentation, à des taux de pesticides extrêmement bas, et certainement bien plus bas que des taux susceptibles de provoquer un début de préoccupation sanitaire», explique Winter. D'ailleurs, dans bon nombre de ces études, les fruits et légumes ne sont pas rincés à l'eau du robinet avant d'être testés, et ce même si d'autres études suggèrent qu'un tel réflexe réduit significativement l'exposition aux pesticides. Une réduction encore plus conséquente quand les végétaux sont rincés et frottés.

A la lumière de tous ces éléments, que faire des études indiquant que les enfants exposés à des pesticides sont davantage susceptibles de développer un TDAH, de souffrir d'autisme et d'avoir un QI plus faible que les autres?

L'important, c'est que concernant ces deux derniers points, les études ne corrèlent pas ces problèmes à l'exposition aux pesticides dans l'alimentation: ce qu'elles trouvent, c'est que les femmes enceintes exposées à des taux élevés de pesticides, que ce soit du fait de leur travail ou parce qu'elles vivent à proximité d'infrastructures agricoles, ont un risque accru de donner naissance à des enfants autistes ou ayant un QI moins élevé.

L'étude liant le TDAH aux pesticides est susceptible, par contre, d'être davantage préoccupante: elle observe que les enfants âgés de 8 ans à 15 ans, et dans l'urine desquels on trouve des traces de pesticides 10 fois supérieures à la moyenne, ont 1,5 fois plus de risques de développer un TDAH. Il convient cependant de remarquer que l'étude ne se fonde que sur un seul échantillon d'urine, il est donc difficile de savoir si ses résultats reflètent une exposition régulière aux pesticides ou si le moment où le test a été effectué relève d'une anomalie.

Dans l'idéal, pour ce genre d'études, il vaut mieux effectuer des tests urinaires sur une longue période de temps, pour voir si leurs résultats sont cohérents. Un scientifique a d'ailleurs critiqué cette étude en remarquant qu'elle ne prend pas en compte le fait que plusieurs membres d'une même famille sont souvent touchés par le TDAH: si les chercheurs avaient contrôlé cette variable, affirmait-il, ils n'auraient sans doute trouvé aucune corrélation entre les pesticides et le TDAH. Enfin, cette étude ne concerne que les pesticides organophosphorés qui sont, chaque année, de moins en moins employés par les agriculteurs américains.

Quel rapport risques/bénéfices?

Concernant les fruits et légumes, il y a aussi quelque chose d'autre à garder à l'esprit: ils sont naturellement bourrés de composés toxiques –que ce soient des flavonoïdes, du peroxyde d'hydrogène ou du formaldéhyde. Une étude menée par Bruce Ames, directeur du centre nutrition et métabolisme au sein du Children’s Hospital Oakland Research Institute estime que les Américains consomment quotidiennement environ 1.500 mg de toxines naturelles issues de végétaux, soit environ 16.000 fois plus que les 0,09 mg de pesticides synthétiques que nous absorbons tous les jours dans notre alimentation.

Ces toxines naturelles ne sont pas là non plus pour rigoler: selon les recherches de Bruno Ames, ces substances chimiques naturelles causent des cancers chez les animaux et, dans une seule tasse de café, on en trouve un poids équivalent à une année d'exposition à des pesticides synthétiques connus pour être cancérigènes.

Dans un rapport de 1996, le National Research Council, une institution non-lucrative qui fournit au gouvernement américain des avis d'experts, on peut lire que «les composants naturels de notre régime alimentaire peuvent se révéler plus dangereux en termes de risques cancérigènes que les composants synthétiques», en partie parce que «les substances chimiques synthétiques sont largement réglementées, contrairement aux substances chimiques naturelles».

Si vous demandez la traduction concrète de ces recherches à Bruno Ames ou au National Research Council, personne ne vous dira «Ne mangez pas de végétaux, ils essayent de nous tuer!».

De l'avis de Bruno Ames, les végétaux sont exceptionnellement bons pour nous en dépit du fait qu'ils contiennent des concentrations élevées de toxines naturelles –et il ajoute que l'infime différence en termes de pesticides entre les aliments biologiques et conventionnels ne mérite vraiment pas que nous nous fassions des cheveux blancs.

De fait, s'il y a bien quelque chose sur laquelle la littérature scientifique n'est pas ambiguë, c'est l'idée qu'une plus grande consommation de fruits et légumes –qu'ils soient bios ou non– est bénéfique pour notre corps. Une synthèse conclut ainsi que les 25% d'Américains qui mangent le plus de fruits et de légumes, qu'importe leur mode de culture, divisent de moitié leur risque de développer un cancer par rapport aux 25% d'Américains qui en mangent le moins.

Les fruits et légumes pourraient aussi protéger contre les maladies cardiovasculaires et le diabète. Une étude fascinante de 2012, fondée sur des modèles issus de données scientifiques, prédit ce qui se passerait si la moitié des Américains augmentait sa consommation journalière de fruits et de légumes d'une seule portion: la chose permettrait d'éviter 20.000 cas de cancer par an. Dans leurs modélisations prenant en compte l'apport accru en pesticides que cette augmentation pourrait générer, les chercheurs ont trouvé, qu'en effet, elle pourrait provoquer 10 cas supplémentaires de cancer par an aux Etats-Unis. Pour le dire autrement, les bénéfices dépassent, et de très loin, les risques encourus.

Ce que nous pouvons en conclure en tant que parents, c'est que nous devrions cesser de nous faire un sang d'encre sur le mode de culture des pommes que nous donnons à nos enfants –et commencer, surtout, à leur donner davantage de pommes –bien sûr, en les lavant si possible avant.

L'EWG ne dit pas le contraire: dans les premiers paragraphes du résumé de son guide 2013 destiné aux consommateurs, l'association souligne que «les bénéfices sanitaires d'un régime riche en fruits et légumes surpassent les risques d'une exposition aux pesticides».

De plus, des peurs irrationnelles quant aux fruits et légumes conventionnels peuvent être à l'origine de dangereuses compensations. Comme me l'a expliqué Brian Zikmund-Fisher, psychologue de la décision œuvrant à l'université du Michigan:

«Si vous ne donnez pas à votre enfant les “bonnes fraises”, vous allez lui donner quoi?»

J'en ai fait l'expérience lors d'une virée au supermarché, avec mon fils affamé dans le caddie: vu que j'avais trop peur de prendre des pommes conventionnelles, je lui ai acheté un paquet de crackers (bio) au fromage. Et je connais des gens qui préfèrent acheter une gourde de compote bio au Starbucks parce qu'ils ne sont pas sûrs de l'origine de leurs bananes. Ce ne sont pas des choix judicieux. En termes d'effets à long terme sur la santé de vos enfants, il vaut largement mieux leur donner l'habitude de manger des fruits et des légumes entiers, qu'importe leur mode de culture, que de leur donner à peu près n'importe quoi d'autre, même si «biologique» ou «naturel» est écrit sur l'étiquette.  

Melinda Wenner Moyer 

Traduit par Peggy Sastre

En plus des sources mentionnées, l'auteur souhaite remercier Jeff Gillman, du Central Piedmont Community College.

[1] En France, conformément à une réglementation européenne, la roténone n'est plus autorisée depuis 2011.