La transdifférenciation au secours de la médecine régénérative
Par Benje le lundi, avril 18 2011, 09:11 - Nouvelles Scientifiques - Lien permanent
Source: CNRS-INSB
Des chercheurs de l'Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et
Cellulaire (IGBMC, CNRS/Inserm/Université de Strasbourg) ont décrit pour
la première fois les étapes du mécanisme de transdifférenciation. Ce
processus permet à une cellule différenciée de changer d'identité et
offre ainsi de belles perspectives à la médecine régénérative. Ces résultats ont été publiés dans la revue Development le 9 mars 2011.
Actuellement, pour remplacer un organe perdu ou défectueux, la médecine
n'offre pas de solution alternative à la greffe. Pourtant, la
transplantation d'organes présente des inconvénients majeurs comme la
trop faible quantité de donneurs, les problèmes de compatibilité ou encore les effets secondaires dus aux traitements anti-rejets.
Pour régénérer des organes sans avoir recours à la
greffe, trois pistes sont en cours d'exploration à ce jour. La première
repose sur l'utilisation de cellules souches embryonnaires humaines
(cellules ES). Pour des raisons de bioéthique, cette technique est
cependant controversée et l'accès à ce type de cellules est très
contrôlé. Depuis quelques années, une deuxième méthode permettrait de
travailler à partir d'autres cellules: les cellules souches
pluripotentes induites (cellules iPS). L'avantage de ce procédé est de
pouvoir dé-différencier une cellule adulte pour qu'elle retrouve ses
caractéristiques embryonnaires. Toutefois, une telle reprogrammation
cellulaire peut entraîner l'accumulation d'aberrations chromosomiques et
augmenter le risque tumoral, lié à la nature des cellules iPS. De ce
fait, la transdifférenciation, processus qui permet à une cellule
différenciée de changer directement d'identité, apparaît comme une autre
piste prometteuse.
L'équipe de Sophie Jarriault de l'IGBMC s'est très tôt intéressée à la
transdifférenciation. En 2008, son groupe de recherche a montré
l'existence de ce phénomène en travaillant sur un modèle de choix: le
ver Caenorhabditis elegans. Cet organisme a permis à l'équipe de suivre,
étapes par étapes, la transformation d'une cellule rectale en
motoneurone.
En inactivant spécifiquement certains gènes, les chercheurs ont cette
fois-ci décrit différents états intermédiaires pour le mécanisme de
transdifférenciation, et ce, malgré l'absence de division cellulaire. De
plus, ils ont constaté que l'une de ses étapes inclut une
dé-différenciation, sans pour autant passer par le stade cellule
pluripotente. Ces résultats indiquent d'une part qu'il existerait un
découplage entre dé-différenciation et multipotence in vivo et d'autre
part, que le potentiel cellulaire est soumis à des processus de contrôle très stricts dans un contexte physiologique. Enfin, les scientifiques ont
remarqué que, lorsque la cellule se dé-différencie et se redifférencie,
elle passe par plusieurs stades semblables à ceux observés pendant le
développement neural embryonnaire.
En tant que voie alternative pour la production de cellules de
remplacement, utilisables par la médecine régénérative, la
transdifférenciation pourrait constituer une réelle promesse pour
l'avenir. La compréhension des mécanismes à l'œuvre dans les phénomènes
de conversion d'un type cellulaire à l'autre permettra de répondre à
des questions fondamentales en lien avec l'identité et la plasticité
cellulaires. Leur caractérisation offrira également la possibilité
d'estimer quels risques cette thérapie cellulaire pourrait présenter
pour le patient.